Alerte Climat – Conférence de Doha : avant qu’il ne soit trop tard !

 Au moment où personne ne se hasarde à croire en une issue favorable à la conférence de Doha, il m’a semblé utile de vous permettre de prendre connaissance sur mon blog du résumé analytique du « Rapport préparé pour la Banque mondiale par le Potsdam Institute for Climate Impact Research et Climate Analytics ».

 

« J’ai l’espoir que ce rapport nous fasse un choc tel qu’il nous pousse à agir », avance Jim Yong Kim, le président de la Banque mondiale. Puisse-t-il avoir raison !

 

Baissons la chaleur: pourquoi il faut absolument éviter une élévation de 4°C de la température de la planète

 

Rapport préparé pour la Banque mondiale par le Potsdam Institute for Climate Impact Research et Climate Analytics

 

Préface

 

J’ai l’espoir que ce rapport nous fasse un choc tel qu’il nous pousse à agir.

 

Même pour ceux d’entre nous qui sont déjà impliqués dans la lutte contre le changement climatique, j’espère que ce rapport les fera travailler avec un sentiment d’urgence encore plus fort.

 

Ce rapport décrit ce que sera le monde si le réchauffement climatique atteint 4°C, et selon les prévisions quasi-unanimes des scientifiques c’est ce qui se produira avant la fin du siècle en l’absence d’un changement drastique de politique.

 

Les scénarios d’élévation de 4°C de la température sont accablants :

 

inondation des villes côtières, menaces sur la production alimentaire menant à une hausse des taux de sous- alimentation et de malnutrition ;

 

désertification accrue des régions sèches, humidification accrue des régions humides ;

 

vagues de chaleur sans précédent dans de nombreuses régions, en particulier sous les tropiques ;

 

aggravation substantielle de la pénurie d’eau dans de nombreuses régions, augmentation de la fréquence des cyclones tropicaux de grande intensité ;

 

perte irréversible de biodiversité, avec notamment la disparition des récifs coralliens.

 

Et, plus grave encore, une planète à +4°C serait si différente de celle que nous connaissons actuellement qu’elle susciterait de grandes incertitudes et que de nouveaux risques menaceraient les capacités de prévision et de planification indispensables à notre adaptation à ces nouvelles exigences.

 

Si des mesures ne sont pas prises pour lutter contre le changement climatique, non seulement l’accession à la prospérité de millions d’habitants des pays en développement sera compromise mais les efforts de développement durable déployés depuis des décennies seront remis en cause.

 

Il est clair que nous en savons déjà beaucoup sur la menace qui nous guette.

 

La science a déterminé sans équivoque que les humains sont responsables du réchauffement climatique ; d’importants changements s’observent déjà.

 

Le réchauffement moyen à l’échelle de la planète atteint 0,8°C par rapport à l’époque préindustrielle ;

 

la température des océans a augmenté de 0,09°C depuis les années 50 et l’eau s’est acidifiée ;

 

le niveau des mers a monté d’environ 20 cm par rapport à l’époque préindustrielle et cette tendance se poursuit à un rythme de 3,2 cm par décennie ;

 

un nombre exceptionnel de canicules a été observé au cours des dix dernières années ; les grandes régions agricoles sont de plus en plus touchées par la sécheresse.

 

Malgré les bonnes intentions de la communauté mondiale déterminée à limiter l’élévation de la température à 2°C au-dessus du niveau de l’époque préindustrielle, un réchauffement supérieur apparaît de plus en plus probable.

 

Les scientifiques s’accordent à prévoir que les engagements de limitation des émissions de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques aboutiront très probablement à un réchauffement de l’ordre de 3,5 à 4°C.

 

Et plus ces promesses tardent à être tenues, plus une élévation de 4°C de la température de la planète paraît probable.

 

Le travail du Groupe de la Banque mondiale est guidé par des données et des faits.

 

Les rapports scientifiques, notamment ceux produits par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat ont motivé notre décision d’intensifier notre travail sur ces questions.

 

Nos efforts ont débouché sur un Rapport sur le développement dans le monde portant sur le changement climatique (qui a permis d’approfondir notre compréhension des implications du réchauffement climatique), sur un Cadre stratégique de développement intégrant le changement climatique et sur un rapport relatif à la Croissance verte et solidaire.

 

La Banque mondiale est l’un des principaux défenseurs d’une ligne d’action ambitieuse en matière de changement climatique, d’une part parce qu’il s’agit d’un impératif moral et d’autre part parce que de telles mesures relèvent du bon sens économique.

 

Mais que se passera-t-il si nous ne réussissons pas à intensifier les efforts d’atténuation ?

 

Quelles sont les implications d’une élévation de 4°C de la température de la planète ?

 

Nous avons commandé ce rapport au Potsdam Institute for Climate Impact Research et à Climate Analytics pour mieux appréhender l’état actuel de la science et les impacts potentiels d’un tel réchauffement sur le développement.

 

Le monde serait si radicalement différent de celui que nous connaissons aujourd’hui qu’il est difficile d’en faire une description exacte ; de nombreux aspects relèvent de projections et d’interprétations complexes.

 

Nous sommes parfaitement conscients des incertitudes qui entourent ces scénarios et nous savons que les experts et les études ne s’accordent pas toujours sur l’ampleur du risque.

 

Néanmoins, il n’est pas possible d’écarter ces scénarios, ce qui justifie en soi la nécessité d’un renforcement des politiques actuelles de lutte contre le changement climatique.

 

Il est vital pour la santé et le bien- être des populations du monde de trouver des moyens d’éviter la réalisation d’un tel scénario.

 

Toutes les régions du monde seront touchées mais ce sont les plus pauvres et les plus vulnérables qui seront le plus durement frappées.

 

Une élévation de la température de 4°C peut – et doit – être évitée.

 

Le Groupe de la Banque mondiale continuera à œuvrer vigoureusement en faveur d’accords internationaux et régionaux et de l’augmentation du financement des interventions climatiques.

 

Nous redoublerons nos efforts de soutien aux initiatives nationales – qui se multiplient – visant à limiter les émissions de carbone et à renforcer les capacités d’adaptation ; nous appuierons une croissance verte et solidaire et un développement intelligent intégrant l’aspect climatique.

Nos efforts en faveur d’une croissance verte et solidaire ont montré qu’une utilisation plus efficace et plus intelligente de l’énergie et des ressources naturelles ouvre de nombreuses possibilités de réduction drastique de l’impact du développement sur le climat, sans pour autant freiner ni la lutte contre la pauvreté ni la croissance économique.

 

Ce rapport nous rappelle avec force que le changement climatique influe sur tout.

 

Les solutions ne se trouvent pas uniquement dans le financement des interventions climatiques ou les projets climatiques.

 

Il faut aussi les chercher dans la gestion efficace des risques et s’assurer que tous nos efforts, toutes nos réflexions intègrent la menace d’une planète à +4°C. Le Groupe de la Banque mondiale se montrera à la hauteur de ce défi.

 

Dr. Jim Yong Kim Président, Groupe de la Banque mondiale

 

Résumé analytique

 

Le présent rapport s’appuie sur la littérature scientifique et des études récentes pour esquisser les conséquences probables et les risques associés à un réchauffement atteignant 4°C d’ici la fin du siècle.

 

Il s’agit d’une tentative rigoureuse de description d’une série de risques, l’accent étant mis sur les pays en développement, et en particulier sur les populations les plus pauvres.

 

Une élévation de 4°C de la température entraînerait des vagues de chaleur sans précédent, de graves sécheresses et d’importantes inondations dans de nombreuses régions, ce qui aurait de sérieuses répercussions sur les écosystèmes et les services qui leur sont associés.

 

Il est toutefois possible de prendre des mesures pour éviter que le réchauffement n’atteigne 4°C et réussir à maintenir l’élévation de la température au-dessous de 2°C.

 

Si des mesures et des engagements supplémentaires ne sont pas pris pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, le monde connaîtra probablement un réchauffement de plus de 3°C par rapport au climat préindustriel.

 

Même en tablant sur une réalisation totale des engagements actuels, on peut chiffrer à environ 20 % le risque d’un réchauffement climatique supérieur à 4°C d’ici 2100.

 

Si les promesses ne sont pas tenues, une élévation de température de 4°C pourrait intervenir dès les années 2060.

 

De plus, si un tel réchauffement, qui s’accompagnerait d’une élévation d’au moins 0,5 à 1 mètre du niveau de la mer, est atteint d’ici 2100, il ne s’agira pas d’un point final : il faudra s’attendre à la poursuite du réchauffement qui pourrait dépasser 6°C au cours des siècles suivants (avec une montée de plusieurs mètres du niveau des mers).

 

La communauté internationale s’est engagée à limiter le réchauffement à moins de 2°C afin d’éviter tout changement climatique « dangereux » ; les petits États insulaires en développement (PEID) et les pays les moins avancés (PMA) ont déterminé qu’un réchauffement mondial de 1,5°C marquerait le seuil au-delà duquel leur développement, voire dans certains cas leur survie, seraient sérieusement remis en cause.

 

Or, la somme totale des mesures actuelles – en place et prévues – permettra très probablement un réchauffement nettement supérieur à ces niveaux.

 

De fait, au vu des tendances actuelles d’émission, il est plausible que la planète connaisse un réchauffement de 4°C avant la fin du siècle.

 

Le présent rapport ne représente pas une évaluation scientifique exhaustive telle que celle que doit produire le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) en 2013-2014 dans son Cinquième Rapport d’Evaluation.

 

Il se concentre sur les pays en développement tout en reconnaissant que les pays développés sont aussi vulnérables et que le changement climatique les expose également à un risque sérieux de dommages majeurs.

 

Le monde a connu récemment une série d’événements extrêmes qui soulignent la vulnérabilité des pays en développement mais aussi des pays riches et industrialisés.

 

Des incertitudes subsistent quant à la prévision de l’ampleur du changement climatique et de ses effets.

 

Nous avons adopté une approche fondée sur le risque, celui-ci étant défini comme le produit de l’impact et de la probabilité : un événement dont la probabilité est faible représente néanmoins un risque important s’il implique des conséquences graves.

 

Aucun pays ne sera à l’abri des impacts du changement climatique.

 

Toutefois, la répartition des impacts sera probablement intrinsèquement inégale et plutôt défavorable aux régions les plus pauvres du monde qui disposent de moins de moyens économiques, institutionnels, scientifiques et techniques pour y faire face et s’y adapter. Par exemple :

 

· même si en valeur absolue, le réchauffement s’annonce plus important sous les hautes latitudes, l’élévation de température sera plus forte sous les tropiques par comparaison avec la plage historique des températures et des extrêmes auxquels les écosystèmes naturels et humains ont déjà dû faire face et s’adapter.

 

Les extrêmes de haute température prévus sous les tropiques sont sans précédent et auront par conséquent des effets considérablement plus importants sur l’agriculture et les écosystèmes ;

 

· sous les tropiques, la montée du niveau de la mer sera probablement de 15 à 20 % supérieure à la moyenne mondiale ;

 

· l’augmentation de l’intensité des cyclones tropicaux sera probablement ressentie de manière nettement plus aiguë dans les régions de basses latitudes ;

 

· il faut s’attendre à une désertification et à une augmentation substantielle de la sécheresse dans de nombreuses régions en développement des zones tropicales et subtropicales.

 

Si la température de la planète devait s’élever de 4°C par rapport aux niveaux de l’époque préindustrielle (situation ci-après désignée par « planète à +4°C »), le monde connaîtrait des vagues de chaleur sans précédent, de graves sécheresses et d’importantes inondations dans de nombreuses régions, ce qui aurait de sérieuses répercussions sur les écosystèmes et les services écosystémiques.

 

Une telle élévation de la température peut encore être évitée : de nombreuses études montrent qu’il existe des méthodes techniquement et économiquement applicables permettant de contenir l’augmentation de la température au-dessous de 2°C.

 

L’ampleur des conséquences pour les pays en développement et le reste du monde sera liée aux décisions que prendront les gouvernements, le secteur privé et la société civile ainsi qu’à leurs choix (dont l’inaction fait malheureusement partie).

 

Impacts et changements observés dans le système climatique 

 

Les effets avérés du changement climatique induit par les émissions de gaz à effet de serre, signalés en 2007 par le Quatrième Rapport d’Evaluation du GIEC ont continué à s’intensifier, à un rythme plus ou moins similaire.

 

· La concentration du dioxyde de carbone (CO2), principal gaz à effet de serre, a continué d’augmenter : de 278 ppm (parties par million) à l’époque préindustrielle, cette concentration a dépassé 391 ppm en septembre 2012, pour un taux d’augmentation actuel de 1,8 ppm par an.

 

· Selon les données paléoclimatiques et géologiques disponibles, la planète n’a jamais connu une concentration aussi élevée de CO2 depuis 15 millions d’années.

 

· Les émissions de CO2 s’élèvent actuellement à environ 35 000 tonnes par an (changement d’affectation des terres compris) et, sans nouvelles mesures, devraient atteindre 41 000 tonnes d’ici 2020.

 

· La température moyenne du globe a continué à augmenter et se situe actuellement environ 0,8°C au-dessus des niveaux de l’époque préindustrielle.

 

Même si un réchauffement planétaire de 0,8°C peut sembler négligeable, de nombreuses conséquences ont déjà été constatées sur le système climatique, et une élévation du réchauffement de 0,8 à 2°C ou plus posera des problèmes encore plus aigus.

 

Par ailleurs, il est utile de rappeler qu’une augmentation moyenne de la température de 4°C représente un écart proche de celui observé entre les températures que nous connaissons actuellement et celles du dernier âge de glace, époque à laquelle une bonne part de l’Europe centrale et le nord des États-Unis étaient couverts par des kilomètres de glace (températures moyennes inférieures d’environ 4,5 à 7°C à l’échelle de la planète).

 

De plus, c’est sur un siècle, et non sur des millénaires, que s’observe un changement climatique d’une telle ampleur, causé par les activités humaines.

 

Les océans ont continué à se réchauffer: environ 90% du surplus d’énergie thermique lié à l’augmentation des concentrations de gaz à effet de serre depuis 1955 est stocké dans les océans sous forme de chaleur.

 

À l’échelle de la planète, le niveau de la mer a connu une augmentation moyenne de 15 à 20 centimètres au cours du XXe siècle.

 

Sur les dix dernières années, le rythme moyen de montée du niveau de la mer s’est accéléré pour atteindre environ 3,2 cm par décennie.

 

Un tel rythme, s’il se poursuit, impliquera une nouvelle élévation de 30 cm du niveau de la mer au cours du XXIe siècle.

 

Le réchauffement de l’atmosphère et des océans entraîne une accélération de la fonte des glaces au niveau de la calotte glacière du Groenland et de l’Antarctique, ce qui, à l’avenir, pourrait encore accroître considérablement la montée du niveau des mers.

 

Globalement, le rythme de disparition des glaces a plus que triplé depuis la période 1993 – 2003, comme le signalait le Quatrième Rapport d’Evaluation du GIEC, atteignant 1,3 cm par décennie sur la période 2004 – 2008 ; la fonte observée en 2009 correspond à un rythme de 1,7 cm par décennie.

 

Si la fonte de la calotte glacière se poursuit à ce rythme, même sans s’accélérer, elle induira à elle seule une élévation du niveau moyen de la mer d’environ 15 cm d’ici la fin du XXIe siècle.

 

L’accroissement de l’effet du réchauffement sur la calotte glacière du Groenland est clairement montré par l’augmentation rapide de la zone de fonte depuis les années 70.

 

Quant à la banquise de l’Arctique, elle a atteint un minimum record en septembre 2012, avec une diminution de moitié de la surface de glace couvrant l’Océan arctique en période estivale sur les trente dernières années.

 

Les effets du réchauffement climatique entraînent aussi des changements de nombreux autres aspects climatiques ou environnementaux du système terrestre.

 

Au cours de la dernière décennie, le monde a connu un nombre exceptionnel de vagues de chaleur extrême dont les conséquences ont été sévères.

 

Depuis les années 60, le changement climatique anthropique a augmenté la fréquence et l’intensité des vagues de chaleur, exacerbant du même coup leurs conséquences sociétales.

 

Dans certaines régions climatiques, une augmentation de l’intensité et/ou de la fréquence des précipitations et des sécheresses extrêmes a été constatée, probablement sous l’influence des activités humaines.

 

En 2010, la Russie a, par exemple, connu une vague de chaleur extrême qui a eu de graves répercussions négatives.

 

Sur la base des estimations préliminaires, cette canicule a causé en Russie 55 000 décès, la perte d’environ 25 % des récoltes de l’année, la destruction d’1 million d’hectares ravagés par les incendies et des pertes économiques de l’ordre de 15 milliards de dollars, soit 1 % du produit intérieur brut (PIB).

 

Hors changement climatique, en Europe, en Russie et aux États-Unis les vagues de chaleur extrêmes devraient par exemple être espacées de plusieurs centaines d’années.

 

Les observations montrent qu’à l’échelle du globe les superficies concernées par des épisodes de canicule ont été multipliées par dix depuis les années 50.

 

De même, la surface des régions frappées par la sécheresse a aussi considérablement augmenté au cours des cinquante dernières années, un peu plus rapidement que ne le prévoyaient les modèles climatiques.

 

La sécheresse qui a frappé les États-Unis en 2012, a eu un impact sur environ 80 % des terres agricoles, ce qui en fait la plus grave sécheresse depuis les années 50.

 

La production agricole a souffert de la hausse des températures : des études récentes soulignent que depuis les années 80 la production de maïs et de blé a connu une réduction significative par rapport au niveau qu’elle aurait eu en l’absence de changement climatique.

 

Au cours des dernières décennies, la hausse des températures a également freiné la croissance économique des pays pauvres, ce qui laisse penser que le développement économique de ces pays pourrait encore pâtir du réchauffement climatique à l’avenir.

 

Une récente étude du MIT1 a analysé la variation des résultats économiques globaux en fonction des fluctuations historiques des températures par pays.

 

Elle conclut que l’élévation des températures induit une réduction substantielle de la croissance économique dans les pays pauvres et a divers autres répercussions comme la réduction des productions agricole et industrielle, et une moins grande stabilité politique.

 

Ces constatations apportent des éléments sur le rôle du climat dans le développement économique et laissent penser que la hausse des températures est susceptible d’avoir d’importantes répercussions négatives dans les pays pauvres.

 

Prévision de l’impact du changement climatique sur une planète à +4°C 

 

Les effets d’un réchauffement de 4°C ne seront pas également répartis dans le monde ; de plus, les conséquences ne seront pas une simple extension de celles entraînées par un réchauffement de 2°C.

 

Le réchauffement le plus important concernera les terres et variera de 4 à 10°C.

 

Une augmentation de 6°C, voire plus, des températures moyennes sur les mois d’été est à attendre dans certaines régions du monde, notamment dans la zone méditerranéenne, l’Afrique du Nord, le Moyen-Orient et les États-Unis.

 

Les projections relatives à une planète à +4°C signalent une augmentation spectaculaire de l’intensité et de la fréquence de pointes de températures extrêmement chaudes.

 

Les récentes vagues de chaleur telle que celle qu’a connue la Russie en 2010 deviendraient la nouvelle norme estivale sur une planète à +4°C.

 

L’Amérique du Sud tropicale, l’Afrique centrale et les îles tropicales du Pacifique seraient probablement exposées à des vagues régulières de chaleur d’une amplitude et d’une durée sans précédent.

 

Selon ce nouveau régime climatique, les mois les plus frais seraient probablement nettement plus chauds que les mois les plus chauds de la fin du XXe siècle.

 

Dans les régions telles que la Méditerranée, l’Afrique du Nord, le Moyen-Orient et le plateau tibétain, il est probable que la plupart des mois d’été soient plus chauds que les vagues de chaleur les plus extrêmes subies actuellement.

 

Par exemple, dans la région méditerranéenne, le mois de juillet le plus chaud pourrait afficher une température supérieure de 9°C au plus chaud mois de juillet de la période actuelle.

 

Ces dernières années, les vagues de chaleur extrême ont eu des conséquences graves, entraînant des décès dus à la canicule, des incendies de forêt et des pertes de récoltes.

 

Les conséquences pour une planète à +4°C de vagues de chaleur extrême telles que prévues dans les projections n’ont pas été évaluées mais l’on peut s’attendre à ce qu’elles dépassent largement les effets subis jusqu’à aujourd’hui et à ce qu’elles excèdent les capacités d’adaptation de nombreuses sociétés et systèmes naturels.

 

1 Dell, Melissa, Benjamin F. Jones et Benjamin A. Olken. 2012. « Temperature Shocks and Economic Growth: Evidence from the Last Half Century », American Economic Journal: Macroeconomics, 4(3): 66-95.

 

Augmentation de la concentration de CO2 et de l’acidification des océans 

 

Outre le réchauffement du système climatique, l’une des plus graves conséquences de l’augmentation de la concentration de dioxyde de carbone dans l’atmosphère est liée à sa dissolution dans l’océan et à l’acidification qui en résulte.

 

On a constaté une importante augmentation de l’acidité des océans par rapport à l’époque préindustrielle.

 

Un réchauffement de 4°C ou plus d’ici 2100 correspondrait à une concentration de CO2 supérieure à 800 ppm et à une augmentation d’environ 150 % de l’acidité des océans.

 

L’évolution de l’acidité des eaux telle qu’elle est observée et prévue sur le prochain siècle semble ne jamais avoir eu de parallèle dans l’histoire de la Terre.

 

On constate d’ores et déjà les conséquences négatives de l’acidification de l’eau sur les organismes et les écosystèmes marins, également exposés aux effets du réchauffement, de la surpêche et de la destruction de l’habitat.

 

Les coraux sont particulièrement sensibles aux changements de la température et du pH de l’eau, ainsi qu’à l’intensité et à la fréquence des cyclones tropicaux.

 

Les récifs coralliens assurent une protection des côtes contre l’inondation, les ondes de tempête et les vagues et constituent des zones d’alevinage et d’habitat pour de nombreuses espèces de poissons.

 

Il se pourrait que les récifs coralliens arrêtent de se développer si la concentration de CO2 s’approche de 450 ppm dans les prochaines décennies (concentration correspondant à un réchauffement d’environ 1,4°C dans les années 2030).

 

Avant que cette concentration n’atteigne 550 ppm (soit un réchauffement d’environ 2,4°C dans les années 2060), il est probable que les récifs coralliens de nombreuses régions auront commencé à disparaître.

 

Avec une élévation de 1,5°C de la température, une grande partie des barrières de corail sera déjà menacée par la combinaison du phénomène de blanchissement dû à la chaleur, de l’acidification de l’eau et de l’élévation du niveau de la mer.

 

Dans certaines régions, l’extinction d’écosystèmes coralliens complets, à craindre bien avant que l’élévation de 4°C ne soit atteinte, aurait de graves conséquences pour les espèces qui en dépendent ainsi que pour les populations qui en tirent leur nourriture et leur revenu et qui en sont dépendantes pour le tourisme et la protection des côtes.

 

Montée du niveau des mers, inondation et destruction des côtes 

 

Un réchauffement de 4°C entraînera probablement une montée du niveau de la mer de 0,5 à 1 mètre, voire plus, d’ici 2100 et au cours des siècles suivants le niveau pourrait encore monter de plusieurs mètres.

 

Par comparaison, en limitant le réchauffement à 2°C, on observerait probablement une montée du niveau de la mer de l’ordre de 20 cm d’ici 2100.

 

Toutefois, même si le réchauffement climatique est limité à 2°C, le niveau moyen du niveau de la mer pourrait continuer à monter à l’échelle planétaire, certaines estimations prévoyant une élévation de 1,5 à 4 mètres au-dessus des niveaux actuels d’ici l’année 2300.

 

Pour contenir la montée des eaux au-dessous de 2 mètres, il faudrait probablement réussir à maintenir le réchauffement nettement au-dessous de 1,5°C.

 

L’élévation du niveau de la mer variera selon les régions : pour un certain nombre de raisons d’origine géophysique, les projections prévoient une montée plus importante de 20 % sous les tropiques tandis que l’élévation du niveau des mers serait inférieure à la moyenne sous les plus hautes latitudes.

 

La fonte des calottes glaciaires induira une réduction de la force gravitationnelle s’exerçant sur les océans au niveau des calottes, d’où une tendance de l’eau à se diriger vers l’Équateur.

 

De plus, les changements des vents et des courants induits par le réchauffement climatique ainsi que d’autres facteurs influeront également sur la montée de la mer dans certaines régions, de même que l’absorption de chaleur par les océans et leur réchauffement.

 

Les projections mettent en évidence des effets asymétriques de la montée du niveau de la mer selon les régions et selon les pays.

 

Sur les projections établies pour 31 pays en développement, deux tiers des risques totaux d’inondations extrêmes concernent 10 villes seulement.

 

Les villes les plus exposées se trouvent au Mozambique, à Madagascar, au Mexique, au Venezuela, en Inde, au Bangladesh, en Indonésie, aux Philippines et au Viet Nam.

 

Pour les petits États insulaires et les régions de deltas, la montée du niveau des eaux aura probablement des conséquences bien plus graves, notamment en combinaison avec les prévisions d’accroissement de l’intensité des cyclones tropicaux dans de nombreuses régions tropicales, d’autres événements climatiques extrêmes et les effets induits par le changement climatique sur les écosystèmes océaniques (disparition des barrières protectrices par suite de l’élévation des températures et de l’acidité des océans, par exemple).

 

Risques pour les systèmes essentiels à la vie humaine : nourriture, eau, écosystèmes et santé humaine 

 

Même si les projections d’impact d’une planète à +4°C en sont encore au stade préliminaire et s’il est souvent difficile d’établir des comparaisons entre les différentes estimations, le présent rapport souligne un certain nombre de risques extrêmement graves qui menacent les systèmes essentiels à la vie humaine.

 

Au vu des extrêmes de température attendus, il faut s’attendre à ce que le réchauffement climatique entraîne une augmentation des vagues de chaleur, des pluies et des sécheresses, ces risques étant bien plus élevés pour une planète à +4°C que pour une planète à +2°C.

 

Avec un réchauffement rapide et une évolution vers une planète à +4°C, il faut s’attendre à des effets très négatifs sur la disponibilité de l’eau, d’autant que la demande va augmenter en raison de l’accroissement de la population mondiale.

 

Selon certaines estimations, un réchauffement de 4°C aggraverait considérablement les problèmes de pénurie d’eau que connaissent déjà de nombreuses régions, notamment dans le nord et l’est de l’Afrique, au Moyen-Orient et dans le sud de l’Asie, tandis que d’autres pays d’Afrique se trouveraient à leur tour confrontés à ce problème à l’échelle nationale en raison de la croissance de leur population.

 

· Les projections prévoient notamment des conditions plus sèches dans le sud de l’Europe, en Afrique (à l’exception de certaines zones du nord-est), dans de grandes parties de l’Amérique du Nord et de l’Amérique du Sud, ainsi que dans le sud de l’Australie.

 

· Des conditions plus humides sont attendues notamment sous les hautes latitudes nord (au nord de l’Amérique du Nord, au nord de l’Europe et en Sibérie) et dans certaines régions exposées à la mousson. Certaines régions pourraient connaître des difficultés d’approvisionnement en eau plus aiguës en raison du changement climatique.

 

· Les changements infrasaisonniers et infrarégionaux du cycle hydrologique sont associés à des risques sévères (inondation et sécheresse, notamment) susceptibles d’être considérablement accrus pas une modification, même minime, des moyennes annuelles.

 

Compte tenu des projections d’augmentation des extrêmes de pluie et de sécheresse en fonction du réchauffement, il faut s’attendre à un accroissement bien plus élevé de ces risques sur une planète à +4°C que sur une planète à +2°C.

 

Situation pour une planète à +2°C :

 

· Les bassins hydrographiques soumis à un régime de mousson (Gange et Nil par exemple) sont particulièrement vulnérables à une modification des débits saisonniers qui peut avoir d’importantes conséquences négatives sur la disponibilité de l’eau.

 

· Les projections prévoient une baisse de 20 à 40 % de l’écoulement moyen annuel dans les bassins versants du Danube, du Mississippi, de l’Amazone et dans le bassin Murray Darling tandis que les bassins du Nil et du Gange devraient connaître une augmentation d’environ 20 %.

 

Il faut s’attendre à un doublement approximatif de l’ampleur de ces changements pour une planète à +4°C.

 

Une élévation de température de 4°C entraînerait un risque nettement plus élevé de perturbations des écosystèmes par suite de variations, d’incendies, de transformation des écosystèmes et de dépérissement des forêts.

 

L’accroissement de l’exposition à la chaleur et à la sécheresse entraînera probablement une augmentation de la mortalité et de l’extinction des espèces.

Les écosystèmes seront affectés par des événements climatiques extrêmes plus fréquents (pertes de forêts à la suite de sécheresses et d’incendies, aggravées par l’utilisation des terres et l’extension de l’agriculture, par exemple).

 

En Amazonie, le nombre des feux de forêts pourrait doubler d’ici 2050 en conséquence d’un réchauffement d’environ 1,5 à 2°C par rapport à l’époque préindustrielle.

 

Des changements encore plus graves sont à prévoir avec une élévation de température de 4°C.

 

De fait, avec une planète à +4°C, il faut s’attendre à ce que le changement climatique devienne le principal moteur des variations des écosystèmes, prenant la place de menace numéro pour la biodiversité, devant la destruction de l’habitat.

 

Des recherches récentes soulignent le risque important de perte de la biodiversité probablement associé à une élévation de 4°C de la température.

 

En effet, en raison du changement climatique et de la hausse de la concentration de CO2, les écosystèmes de la Terre connaîtront des conditions sans précédent dans l’expérience humaine.

 

Il faut s’attendre à ce que les dommages subis par les écosystèmes réduisent considérablement la disponibilité des services écosystémiques dont dépend la société humaine (poissonneries et protection côtière assurée par les récifs coralliens et les mangroves, par exemple).

 

Par ailleurs, le maintien d’un niveau de production agro-alimentaire adapté sera un véritable défi compte tenu de l’augmentation de la population et du niveau des revenus, même indépendamment du changement climatique d’origine anthropique.

 

Le Quatrième Rapport d’Evaluation du GIEC prévoyait que la production alimentaire mondiale augmenterait avec une élévation moyenne de la température locale comprise entre 1 et 3°C mais pourrait décroître avec des températures supérieures.

 

Toutefois les conclusions publiées dans l’intervalle sont beaucoup moins optimistes.

 

Elles suggèrent en effet une augmentation rapide du risque de réduction du rendement agricole lié au réchauffement.

 

D’importants effets négatifs ont été observés à des températures extrêmes élevées dans diverses régions, notamment en Inde, en Afrique, aux États-Unis et en Australie.

 

D’importants effets non linéaires ont ainsi été observés aux États-Unis pour le blé avec des températures locales journalières allant jusqu’à 29°C et pour le soja avec des températures de 30°C.

 

Au vu de ces nouvelles conclusions et observations, il semble qu’il y ait un important risque de franchissement des seuils de températures pouvant entraîner une remise en cause substantielle de la sécurité alimentaire du monde en cas d’élévation de la température de 4°C.

 

Ces risques sont encore accrus par les effets négatifs qu’aura la montée du niveau de la mer sur l’agriculture dans les basses terres des deltas, par exemple au Bangladesh, en Égypte, au Viet Nam ou dans certaines parties côtières de l’Afrique.

 

La montée du niveau de la mer devrait avoir un impact sur de nombreuses zones côtières de latitudes moyennes et entraîner une augmentation de la pénétration de l’eau de mer dans les aquifères utilisés pour l’irrigation des plaines littorales.

 

Il faut également compter avec la probabilité d’une aggravation de la sécheresse dans les régions de latitude moyenne et d’une multiplication des inondations aux latitudes plus élevées.

 

L’augmentation prévue de l’intensité des événements extrêmes devrait à l’avenir avoir des implications négatives sur les efforts de réduction de la pauvreté, en particulier dans les pays en développement.

 

Certaines projections récentes soulignent que les populations pauvres seraient particulièrement sensibles à l’augmentation de l’intensité de la sécheresse qui accompagnerait une élévation de 4°C de la température, spécialement en Afrique, en Asie du Sud et dans d’autres régions.

 

Des événements extrêmes à grande échelle (inondations majeures ayant des conséquences sur la production alimentaire, par exemple) pourraient également entraîner des déficits nutritionnels et une incidence accrue des maladies épidémiques.

 

Les inondations peuvent entraîner l’introduction de polluants et d’éléments pathogènes dans les réseaux d’approvisionnement en eau potable et augmenter l’incidence des maladies diarrhéiques et respiratoires.

 

Les effets du changement climatique sur la production agricole risquent d’aggraver la sous-alimentation et la malnutrition dans de nombreux pays en développement qui connaissent déjà actuellement une mortalité infantile élevée.

 

Si la croissance économique devrait permettre de réduire les retards de croissance des enfants, ces améliorations pourraient être remises en cause par le changement climatique dans un certain nombre de régions : une augmentation substantielle des retards de croissance due à la malnutrition est à attendre en cas de réchauffement de 2 à 2,5°C, en particulier en Afrique subsaharienne et en Asie du Sud ; la situation s’aggraverait encore avec un réchauffement de 4°C.

 

Malgré de gros efforts d’amélioration des services de santé (amélioration des soins médicaux, développement de la vaccination, programmes de surveillance, par exemple), il faut s’attendre à d’importantes conséquences supplémentaires sur les niveaux de pauvreté et de santé.

 

Les changements de température, de précipitation et d’humidité influent sur les maladies à transmission vectorielle telles que le paludisme et la dingue, ainsi que sur les hantavirus, la leishmaniose, la maladie de Lyme et la schistosomiase.

 

Le changement climatique pourrait avoir d’autres conséquences sur la santé, notamment des blessures et des décès causés par des événements climatiques extrêmes.

 

L’amplification du phénomène de smog due à la chaleur pourrait entraîner une augmentation des problèmes respiratoires et des maladies cardiovasculaires tandis que dans certaines régions, les plus fortes concentrations d’allergènes (pollens, spores) imputables au changement climatique entraîneraient une multiplication des troubles respiratoires d’origine allergique.

 

Risques de perturbations et de déplacements des populations en cas d’élévation de la température de 4°C 

 

Le changement climatique n’est pas un phénomène isolé, il doit être replacé dans son contexte.

 

Au cours du XXIe siècle, la croissance économique et démographique devrait s’accompagner d’une progression du bien-être et d’une meilleure capacité d’adaptation des populations dans beaucoup, voire dans la plupart des régions.

 

D’un autre côté, on observera certainement des tensions accrues et une augmentation des pressions subies par un écosystème planétaire déjà proche de ses limites critiques.

 

La résilience de nombreux écosystèmes, naturels ou non, a toutes les chances d’être mise à rude épreuve par ces pressions et par les conséquences du changement climatique.

 

Les impacts attendus sur la disponibilité de l’eau, les écosystèmes, l’agriculture et la santé humaine pourraient entraîner un déplacement de population de grande envergure et avoir des conséquences sur la sécurité humaine, ainsi que sur les systèmes économiques et commerciaux.

 

Les dégâts que pourrait causer une élévation de la température de 4°C sont encore loin d’avoir été évalués en totalité.

 

Les changements à grande échelle et les perturbations qu’ils sont susceptibles d’induire sur le système terrestre ne sont généralement pas pris en compte dans les exercices de modélisation, et le sont rarement dans les évaluations d’impact.

 

Au fur et à mesure que le réchauffement climatique s’approchera d’une élévation de la température de 2°C puis dépassera cette valeur, il y aura de plus en plus de risques que ne soient franchis des seuils entraînant un basculement non linéaire du système terrestre avec des conséquences brutales et l’émergence de régimes climatiques comprenant des températures d’une chaleur sans précédent.

 

La désintégration de la calotte glaciaire de l’Antarctique occidental pourrait par exemple entraîner une montée du niveau de la mer supérieure à ce que ne prévoit la présente analyse ; le dépérissement à grande échelle de la forêt amazonienne pourrait affecter radicalement les écosystèmes, l’agriculture, la production énergétique ainsi que les moyens de subsistance des hommes à une échelle quasiment continentale, augmentant ainsi de manière substantielle le réchauffement climatique du XXIe siècle.

 

Certains secteurs économiques pourraient également réagir de manière non linéaire à un réchauffement climatique élevé.

 

Il faut par exemple s’attendre à des effets non linéaires sur les récoltes en cas d’élévation progressive de la température de 2°C, voire davantage.

 

Pourtant, la plupart de nos modèles de culture actuels ne tiennent pas encore pleinement compte de cet effet, pas plus que de l’élargissement potentiel des plages de variations (extrêmes de température, nouveaux organismes nuisibles et maladies, modification radicale de facteurs climatiques critiques ayant d’importantes conséquences sur les récoltes ou sur la qualité des céréales, par exemple).

 

En règle générale, les projections des coûts imputables aux changements climatiques tiennent compte des pertes subies localement – y compris par les infrastructures – mais n’intègrent pas suffisamment les effets en cascade à l’échelon national et régional (sur la chaîne de valeur ajoutée et les réseaux d’approvisionnement, par exemple).

 

Pourtant, dans un monde de plus en plus globalisé, qui connaît un accroissement de la spécialisation des systèmes de production et donc une plus grande dépendance des infrastructures pour la livraison des produits, tout dommage à un système d’infrastructure est susceptible d’entraîner d’importantes conséquences indirectes.

 

Les ports maritimes en sont un excellent exemple : une panne ou une perturbation substantielle des infrastructures portuaires peut avoir un impact dépassant largement le lieu d’origine des dommages.

 

Il n’est pas facile d’appréhender avec précision les effets cumulés et combinés de tels effets qui risquent de se faire sentir bien avant que l’élévation de la température n’atteigne 4°C.

 

Aucune étude scientifique n’a, par exemple, encore été publiée sur les conséquences écologiques, humaines et économiques de l’effondrement des écosystèmes des récifs coralliens.

 

C’est en outre un problème qui devrait être étudié en combinaison avec les risques de perte de production marine dus à la hausse des températures et de l’acidité des océans, sans oublier les conséquences à grande échelle sur les établissements et les infrastructures humaines qui seront causées dans les terres basses des zones littorales par la montée du niveau de la mer d’un mètre, voire plus, d’ici la fin du siècle et au-delà.

 

L’ampleur et le nombre des conséquences augmentant en même temps que la température moyenne du globe, il faut s’attendre à observer des interactions entre les différents effets, interactions qui ne manqueront pas d’aggraver l’impact global.

 

Si par exemple la production agricole est fortement ébranlée par des hausses extrêmes de température dans de nombreuses régions et si on observe, parallèlement, des tensions du côté des ressources en eau et des changements du cycle hydrologique, des conséquences sur la santé et les moyens de subsistance humains sont inévitables.

 

Par suite d’effets en cascades, le développement économique pourrait aussi pâtir si la capacité de travail de la population est réduite et la croissance du PIB serait freinée.

 

Les pressions s’accroissant au fur et à mesure que le réchauffement progresse vers la barre des 4°C et se combinant à des tensions sociales, économiques et démographiques indépendantes de l’évolution climatique, le risque de dépassement de seuils critiques pour l’équilibre du système social augmente en parallèle.

 

Une fois ces seuils atteints, les institutions existantes dont on aurait pu attendre des mesures d’adaptation perdront en efficacité, voire s’écrouleront complètement.

 

Dans les atolls, par exemple, la montée du niveau de la mer risque d’excéder les capacités d’une migration d’adaptation maîtrisée et aboutir à un abandon total des îles ou des régions concernées.

 

De même, les tensions que représenteront pour la santé humaine des phénomènes comme les vagues de chaleur, la malnutrition et la baisse de la qualité de l’eau potable par contamination de l’eau de mer pourront entraîner une telle surcharge des systèmes de santé que l’adaptation ne sera plus possible et la dislocation inévitable.

 

Au vu des incertitudes qui continuent à planer sur la véritable nature et l’ampleur de ces conséquences, nous n’avons aucune certitude qu’une adaptation à une planète +4°C est possible.

 

Avec une telle hausse de la température, il faut s’attendre à ce que les populations, les villes et les pays connaissent de graves perturbations, des dommages et des bouleversements, d’autant que ces risques seront probablement inégalement répartis.

 

Il est probable que les pauvres souffriront davantage et que la communauté mondiale sera encore plus divisée et plus inégalitaire qu’aujourd’hui.

 

Il ne faut donc pas laisser se réaliser cette projection d’un réchauffement de 4°C : il faut baisser la chaleur.

 

Seule une action précoce, coopérative et internationale peut le permettre.

 

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