Énergie – Urgence énergétique – Investir dans les technologies de demain (3ème et dernier volet)

 

   Expatrié en Nouvelle-Zélande depuis plus de 20 ans, le docteur Louis Arnoux est un expert en énergie.

 

Louis Arnoux cumule 40 années d’expérience en développement industriel et R&D dans le domaine des nouvelles technologies et des réseaux d’énergie.

 

Il est co-inventeur du réseau IndraNet et du système nGen. 

Expatrié en Nouvelle-Zélande, il conseille l’Australasie dans sa mutation énergétique au travers d’un partenariat public-privé. 

 

Il a adressé une note de synthèse très pédagogique à MoneyWeek, traduit par Simone Wapler,  sur le Peak Oil et la raréfaction du pétrole, dont je vous livre ici le 3e volet.

 

Hier, nous avons vu dans le 2e volet que le besoin d’énergie devenait critique et que l’EROI était le seul ratio qui vous permettait de ne pas vous tromper d’investissement.

  

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Une course contre la montre

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Cette situation, qui s’aggrave rapidement, avait été anticipée au début des années 1970 (notamment par les Meadows et leur équipe, dans l’orbite du Club de Rome).

 

Ces avertissements – ainsi que d’autres émis depuis et de plus en plus pressants – furent ignorés et même abondamment ridiculisés par des décideurs qui étaient loin de comprendre l’énergie et son importance vitale dans le développement économique.

 

Maintenant, le temps presse.

 

Les technologies, les énergies alternatives, les infrastructures de transport et de télécommunication qui auraient dû être développées et déployées depuis les années 1970 nous manquent.

 

Un changement d’infrastructure prend environ 40 ans et la fenêtre de temps pour redresser la barre est de moins de 20 ans.

 

Le changement climatique est une réalité ainsi que d’autres dégradations écologiques que nous devons affronter en raison de l’énorme utilisation des combustibles fossiles du XXe siècle jusqu’à nos jours.

 

Les conséquences seront extrêmement graves, bien plus graves que ce que les gens estiment. 

Cependant, ces conséquences se développeront principalement dans le long terme.

 

En revanche, la question de l’énergie représente dès maintenant un danger immédiat.

 

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La technologie de l’énergie

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C’est dans cette course contre la montre qu’il y aura des gagnants et des perdants.

 

Selon moi, une transition ordonnée vers le développement durable n’est plus faisable pour tous.

 

Le mot-clé de notre époque est désormais « urgence de l’énergie ».

 

Cependant, tout réservoir d’énergie, que ce soit un tas de charbon, un baril de pétrole, un m3 de gaz, ou la lumière du soleil, n’est d’aucune utilité sans la technologie rentable et appropriée pour le convertir en énergie utilisable.

 

En réponse aux défis économiques, écologiques et de l’énergie fossile, les nouvelles technologies capables d’aboutir à une utilisation viable des sources renouvelables d’énergie émergent maintenant comme les nouvelles sources de richesse.

 

Dans ce nouvel environnement, les technologies de l’énergie viable conditionnent tous les autres secteurs.

 

Le tableau est à ce stade très contrasté.

 

Aucune des technologies émergentes qui conduisent à une certaine forme de viabilité (solaire direct, ou indirect tel que éolien, hydraulique ou biomasse) ne peut rentrer en concurrence avec le carburant fossile sans de très lourds subsides gouvernementaux.

 

Le nucléaire n’est même pas éligible en raison de son prix et de son mauvais rendement énergétique. 

À cet égard, les infrastructures héritées des combustibles fossiles ont aussi pour caractéristiques un rendement exécrable.

 

Peu de gens réalisent que le rendement énergétique global de nos réseaux électriques est actuellement inférieur à 20% (1).

 

Le modèle centralisé des grosses centrales est obsolète (2).

 

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Perspectives d’investissement

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Pour être gagnants, les investissements doivent se focaliser sur les quelques nouvelles technologies qui peuvent aboutir à un EROI élevé par des moyens viables.

 

Ceci conduit presque exclusivement à des technologies capables de donner accès à l’énergie solaire directe ou indirecte, sous une forme distribuée, puisque les ressources viables sont par essence distribuées, que les utilisateurs finaux sont disséminés, et que le modèle centralisé ne peut aboutir à un rendement élevé car dans ce modèle une grande quantité d’énergie gaspillée ne peut être recyclée.

 

Le défi de ces nouvelles technologies est de produire les flux d’énergie que requièrent les utilisateurs finaux sur leurs propres sites (c’est-à-dire pas seulement l’électricité, mais aussi des flux froids ou chauds et des moyens de transport).

 

Un autre éventail de nouvelles technologies critiques est requis pour éviter à chacun la carence énergétique dans laquelle nous allons tomber.

 

Il s’agit des technologies de l’information permettant de distribuer la génération d’énergie de façon intégrée dans des réseaux locaux intelligents.

 

C’est la seule voie pour atteindre le rendement élevé, les faibles coûts et la durabilité qui sont maintenant nécessaires dans la fenêtre de temps qui nous reste.

 

Le paradoxe est que tandis que le tableau des combustibles fossiles est celui d’une effrayante raréfaction, les perspectives du solaire sont celles d’une abondance quasi illimitée.

 

L’énergie solaire tombant annuellement sur terre est bien plus grande que tout ce que l’humanité peut consommer.

 

Techniquement, il est parfaitement réalisable d’aboutir à une énergie renouvelable abondante fournie avec un EROI élevé.

 

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Un changement radical dans notre façon de penser

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Cependant, ceci requière un changement radical dans notre façon de penser les technologies de l’énergie et les développements d’infrastructures au sein d’une industrie qui est très conservatrice.

 

Le savoir-faire existe – je fais partie d’une communauté internationale de scientifiques, d’ingénieurs et d’entrepreneurs qui le développent.

 

La course dont je parle concerne le temps qu’il faut pour obtenir que ces nouvelles méthodes soient acceptées et que de nouvelles infrastructures soient déployées dans la fenêtre temporelle qui nous est laissée.

 

Nous entrevoyons un futur radieux, au sens propre, cependant il exige des actions rapides et pointues, surtout de la part d’investisseurs lucides.

 

(1) Par exemple, Robert Ayres, professeur émérite à l’INSEAD, a démontré que les économies la plus importante et la plus développée des économies, les Etats-Unis fonctionne avec seulement 13% de rendement énergétique, ce qui signifie qu’elle gaspille 87% de l’énergie primaire qu’elle consomme – Robert U. Ayres and Edward H. Ayres, 2010, Crossing the Energy Divide: Moving from Fossil Fuel Dependence to a Clean-Energy Future, Pearson Prentice Hall.

 

(2) Voir Frank Klose, Michael Kofluk, Stephan Lehrke, Harald Rubner, juin 2010, Towards a distributed-power World : énergies renouvelables et réseaux intelligents transformeront le secteur de l’énergie, Boston Consulting Group.

http://www.bcg.com/expertise_impact/publications/

PublicationDetails.aspx?id=tcm:12-51645

 

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4 Commentaires sur

Énergie – Urgence énergétique – Investir dans les technologies de demain (3ème et dernier volet)

  • Jean-JacquesNo Gravatar |

    des actions rapides et pointues, surtout de la part d’investisseurs lucides.
    la nécessité d’un changement dans notre façon de penser les technologies de l’énergie et les développements d’infrastructures au sein d’une industrie qui est très conservatrice.
    la balle est dans le camp du capital; mais c’est bien le monde le plus sourd qui existe, sauf en ce qui concerne le son des bénéfices tombant chaque mois dans les portefeuilles cotés en bourse

  • PhotovoltaiqueNo Gravatar |

    Effectivement il y a urgence en matière d’énergie! Pourtant les prises de conscience restent malheureusement très limitées en France. Les industries préfèrent garder leur confort énergétique avec les énergies fossiles sous prétexte que les nouvelles technologies sont trop coûteuses!
    L’énergie solaire est l’énergie de demain, espérons seulement que les principaux acteurs de l’économie s’en rendront compte à temps et agissent le plus rapidement possible.

  • NOËLNo Gravatar |

    Cela fait vingt ans que des scientifiques ont sonné l’alarme, plus quarante ans pour prendre des initiatives urgentes en 2011=2071!

    La moutarde me monte au nez!

    Bravo pour cet article!!

  • ùXBäNo Gravatar |

    il ne faut pas se faire d’illusions,le changement de comportement énergétique ne se produira que dans l’un des deux scénarios suivants :
    1/ une énorme catastrophe ou une série de catastrophes naturelles viennent tout perturber.
    2/ les énergies alternatives deviennent plus rentables que les énergies fossiles par épuisement de ces dernières…
    quel que soit le cas de figure qui servira de déclencheur , je n’arrive toujours pas à comprendre pourquoi on n’ouvre pas une discussion au plan mondial sur une stabilisation de la population terrestre à son niveau actuel…
    oublierait-on que les besoins énergétiques sont la multiplication des besoins individuels ?

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