La pitoyable vision du gouvernement sur la question de l’emploi des jeunes

 

Jean-Claude Fruteau a demandé au gouvernement ce qu’il comptait faire pour résoudre la question du chômage des jeunes à La Réunion.

Voilà l’intégralité de la réponse du Gouvernement :


« Dans les départements et collectivités d’outre-mer, la lutte contre le chômage, et plus particulièrement le chômage des jeunes, constitue une priorité pour le Gouvernement, qui se traduit par le maintien de l’effort budgétaire consenti en ce domaine depuis ces dernières années, au travers notamment des contrats aidés.

Ainsi, 33.392 contrats d’accompagnement dans l’emploi (CAE) ont été ouverts en 2010 pour l’ensemble de l’outre-mer, dont 20 242 pour La Réunion.

Au total, ce sont 34 383 CAE qui ont été réalisés outre-mer, dont 22 269 à La Réunion, au titre de l’année 2010… »


Commentaires : la première réponse du gouvernement pour l’emploi des jeunes… c’est le CAE. Voilà comment le gouvernement présentait le CAE :

« Le contrat d’accès à l’emploi (CAE), réservé aux employeurs des départements d’Outre-mer et à la collectivité  territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon, est destiné à favoriser l’embauche de personnes rencontrant des difficultés  particulières d’accès à l’emploi.

La conclusion d’un CAE vous permet de bénéficier d’aides allouées par l’Etat et  d’exonérations de cotisations de Sécurité sociale ».

Le nombre de CAE, soit dit en passant, est insuffisant. Unique perspective pour des milliers de jeunes : un emploi dit aidé, un petit contrat. Quel avenir !


«…Cependant et comme le souligne l’honorable parlementaire, les jeunes actifs de moins de 25 ans restent les plus touchés par le chômage, et leur taux de chômage s’avère très lié à leur niveau de formation.

Aussi, et afin de favoriser l’insertion professionnelle des jeunes, le Gouvernement mène-t-il également une action particulière, destinée à améliorer leur employabilité, au travers de parcours de formation qualifiante, avec des mesures d’aide à la formation professionnelle en mobilité, d’une part, et de formation par l’alternance et de la professionnalisation, d’autre part.

Il importe de souligner que les conseils régionaux d’outre-mer ont une compétence d’attribution en matière de formation professionnelle… »


Commentaires : Une relation entre niveau de formation et chômage ? Peut-être, mais c’est une vision complètement restrictive de la situation.

Combien de jeunes avec Bac+3 ou Bac+5 sont au chômage ? La mobilité ? En fusionnant les dispositifs, ce qui, in fine, fait croire que les montants mobilisés sont les mêmes, alors qu’ils ont baissé.


Et une mobilité essentiellement tournée vers l’Europe. Au détriment de pays émergents ou de la zone océan Indien.

Bien sûr que les régions – dont celles d’outre-mer – ont une responsabilité dans la formation professionnelle, celle des jeunes, bien sûr.

Mais les régions de France métropolitaine ont les mêmes compétences. Alors, cette précision, apportée en réponse à une  question d’un député réunionnais aurait-il une signification particulière ?


Cela voudrait-il dire que la Région Réunion est en dessous de ce que l’on peut en attendre (dans ce domaine aussi) ?

Fort possible. Car en Guadeloupe notamment, la Région a une marge de manœuvre plus importante en matière de formation professionnelle, du fait qu’elle puisse faire des « lois péi », ce qui est impossible pour La Réunion à cause d’un autre UMP Relève nommé Jean-Paul Virapoullé !


« Néanmoins, l’offre globale de formations ne permet pas de couvrir localement l’ensemble des besoins de leur économie et d’assurer à leurs jeunes la qualification nécessaire pour accéder plus facilement à un emploi :

en matière de formation professionnelle en mobilité, les mesures mises en œuvre  par l’État visent à permettre aux jeunes ultramarins de s’insérer de façon durable dans l’emploi, à l’issue d’un parcours de formation qualifiante en métropole, dès lors que cette formation n’est pas dispensée sur place,

soit dans le cadre de stages de formation professionnelle qualifiante, tels qu’ils s’inscrivent sur le lot n° 3 « ultramarins » du marché État/AFPA (Association nationale pour la formation professionnelle des adultes) du 15 juin 2009,

soit dans celui du passeport mobilité formation professionnelle destiné à accompagner les jeunes ultramarins venant suivre en métropole une formation qualifiante, non dispensée sur place ;… »


Commentaires : quel est le bilan de ce « marché de formation » passé en 2009 entre l’Etat et l’AFPA ?

Pourquoi un tel silence à ce sujet ?

Est-ce parce que depuis des années, l’Etat fait des contorsions extraordinaires pour finaliser le bouclage financier l’AFPA ?

Mais le résultat est là : L’AFPA n’a plus les moyens de mettre en œuvre dans de bonnes conditions sa nécessaire mutation et surtout son fonctionnement.


« En matière de formation par l’alternance et la professionnalisation, l’action menée en faveur d’une meilleure insertion professionnelle des jeunes ultramarins se traduit notamment par une action de partenariat avec les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA), destinée à décliner, outre-mer, les mesures ciblées au niveau national en ce domaine.

En effet, les missions des OPCA ont été redéfinies par la loi du 24 novembre 2009 relative à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie et visent à contribuer au développement de la formation professionnelle continue, à informer, sensibiliser et accompagner les entreprises dans l’analyse et la définition de leurs besoins en matière de formation professionnelle… »


Commentaires : un dispositif identique à celui appliqué en France métropolitaine.

Là aussi, on attend le bilan. Tant pour la France que pour l’outre-mer !


« …Dans ce cadre, une convention a été signée, en juin 2010, entre le ministère chargé de l’outre-mer, l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité (LADOM) et chacun des OPCA œuvrant outre-mer, soit OPCALIA et AGEFOS PME (Association de gestion des fonds salariés des petites et moyennes entreprises), afin de développer l’accès des jeunes au contrat de professionnalisation, en renforçant les pratiques partenariales opérationnelles sur l’identification des besoins en recrutement dans les TPE-PME… »


Commentaires : LADOM ? parlons-en. Et mettons cartes sur table. Tant du côté de la Région que de l’Etat.

En outre, en quoi cette convention entre les OPCA et le ministère est intéressante ?

L’identification des besoins des TPE et PME outre-mer : c’est ce qui avait été réalisé par la Région, en 2004, au moment de l’élaboration du PRDF (plan régional de développement des formations).


Entre 2004 et 2010, la Région a également mis en place les dispositifs pour que les formations proposées correspondent aux besoins.

C’est vrai pour la construction de la route des Tamarins. Cela l’aurait été également pour le tram train).

Mais en posant la réponse dans ces termes, le gouvernement joue à fond la carte de l’adéquation emploi / formation. Assez réducteur comme concept !


« …Enfin, l’insertion professionnelle des jeunes demandeurs d’emploi réunionnais bénéficie d’une mesure particulière, puisque le département de la Réunion a été le seul département d’outre-mer, sur un total de seulement 35 départements, à bénéficier de l’expérimentation menée en matière de contrats d’autonomie, dispositif d’accompagnement renforcé vers l’emploi, dont la réalisation est menée de façon expérimentale pendant quatre ans (jusqu’en 2011).


Commentaires : Le contrat d’autonomie ? Voilà comment il est présenté par le gouvernement :

«Tout faire pour ne laisser aucun jeune au bord du chemin; pour que chacun d’entre eux se voit  proposer un stage, un emploi ou une formation ».

Il est à destination des jeunes des ZUS (zones urbaines sensibles). Voilà de quoi il s’agissait en substance :

« Expérimenter, dans le cadre de la sécurisation d’un projet professionnel des jeunes en difficulté  d’insertion, un parcours d’autonomie court et intensif orienté vers l’emploi financé par l’Etat et  donnant lieu à un contrat signé entre le jeune et un opérateur, avec des droits et de devoirs  renforcés.

Par ce contrat, le jeune s’engage à être assidu, à suivre les actions de formation et d’insertion définies conjointement avec l’opérateur, et à rechercher activement un emploi. »


En 2009, le site Marianne expliquait : « Censés révolutionner la politique de l’insertion, ils ont surtout servi à remplir les caisses des entreprises du secteur. (…).

Les marchés ont donc été attribués en quasi-totalité à des entreprises, et à quelques associations, qui ont demandé entre 6000 et 9000€, selon les zones, pour chaque contrat aboutissant à un emploi ou à une formation professionnalisante.

Ce que font quotidiennement les missions locales pour 3000 €. Le nouveau système devait cependant offrir une meilleure connexion avec les entreprises du bassin d’emploi. (…).

Constat d’échec : le nombre de contrats signés est inférieur de 30 à 50% aux objectifs selon les zones.


Sur ces contrats, le taux national moyen de ceux débouchant sur un emploi ou une formation est de 7%, soit moins de 900. (…).

Le budget annuel de 85 M€ prévu pour les contrats d’autonomie aurait pourtant permis d’augmenter de 50% celui des missions locales, mais il aurait fallu renoncer à la gloriole d’un moment que représente la mise en place d’un nouveau mécanisme (…) ;

Dans les faits, les contrats d’autonomie ont déjà coûté plus de 30 millions pour moins de 1 000 emplois ou formations.


Trente mille euros pièce, ça fait fort cher l’emploi trouvé (et la formation encore davantage).

 

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