Le projet socialiste et les outremers ( 14/30 ) – Vers un système pérenne et équilibré de soutien aux investissements ?

 

Dans le prolongement des articles consacrés au projet global, voici la présentation des propositions socialistes pour l’outre-mer.

Il appartient aux responsables politiques réunionnais d’envisager de marquer d’une empreinte réunionnaise ce projet présidentiel de 2012. Dès lors, il est ouvert à toute discussion.

 

La 14e proposition des socialistes est celle-ci :

 

« Bâtir un système pérenne et équilibré de soutien aux investissements entre les différents dispositifs (défiscalisation, dotations budgétaires, banque d’investissement) ».


Lors du débat du projet de loi de finances pour 2011, partie consacrée à l’outre-mer, le député socialiste Claude Bartolone, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, déclarait :

« Je ne suis pas, par principe, favorable à la défiscalisation.

Je le suis d’autant moins que, pour un coût identique, une subvention budgétaire permettrait d’apporter à l’outre-mer un soutien plus important.

La commission des finances, dans son rapport de 2008 sur les niches, a bien montré l’existence d’un phénomène d’évaporation fiscale inhérent à la défiscalisation ».


Puis Claude Bartolone insistait :

« Comme je l’évoquais précédemment, le logement social est également financé, depuis la LODEOM, par un nouveau dispositif de défiscalisation.

Cette dépense fiscale est typique de celles qui pourraient utilement être transformées en subvention budgétaire.

C’est d’ailleurs ainsi que le logement social était financé jusqu’à l’entrée en vigueur de la LODEOM, qui, à mon sens, a donc introduit une complexité supplémentaire pour les bailleurs sociaux.

Par ailleurs, nous avons montré que l’application de la loi sur ce point précis n’est pas totalement conforme à l’intention du législateur.

La défiscalisation a vocation à compléter la LBU, et non à s’y substituer ».


Position partagée par Jean-Claude Fruteau. Et par le député martiniquais Serge Letchimy (apparenté socialiste) qui lui, affirmait :

« Je suis d’accord avec Claude Bartolone pour estimer qu’il va falloir analyser dans le détail la question de la défiscalisation, mais, dans l’immédiat, qui peut dire que celle-ci n’a aucune retombée sur le plan des investissements, de la création d’activité et d’emplois ?

Pour ma part, je crois qu’elle en a une.

Cela étant, après ce que j’ai entendu, je ne pense pas qu’il faille la défendre bec et ongles ; il faut certainement lui substituer d’autres dispositifs dans certains cas, notamment dans le domaine du logement social ».


Avant que Victorin Lurel, ne précise :

« Comment se fait-il, madame la ministre, alors même que votre collègue du budget, lui-même anciennement chargé de l’outre-mer, déclare publiquement mi-septembre que « remettre en cause la défiscalisation outre-mer serait un désastre pour nos territoires », que le principal vecteur de financement de nos économies se retrouve réformé pour une quatrième fois en deux ans ?

Et ce alors même que les investisseurs ont avant tout besoin de stabilité juridique et fiscale, comme le rappelait d’ailleurs le Président de la République dans son discours du 12 juillet 2006 en clôture de la convention UMP sur l’Outre-mer :

« La défiscalisation est, en réalité, un outil de développement pour des économies sous capitalisées et spontanément peu attractives pour des investisseurs.

Des engagements ont été pris par l’État sur quinze ans, ils doivent être respectés. »


Toujours dans cette même discussion, Patrick Lebreton affirmait :

« Heureusement, dans quelques mois, nous aurons la possibilité de rompre avec ces conservatismes et ces blocages.

Nous aurons une chance unique de donner un élan et enfin un réel espoir à l’outre-mer.

Cette nouvelle donne doit nécessairement passer par une remise en cause profonde du système actuel.

En priorité, ce défi consistera à nous attaquer réellement aux retards énormes de nos territoires dans de multiples domaines : la santé, les infrastructures, l’emploi, l’éducation et l’alphabétisation, le logement.

Ensuite, nous devrons lutter contre l’intolérable phénomène de la vie chère, en remettant totalement en cause les circuits économiques, mais également en soutenant de manière directe le pouvoir d’achat, par le SMIC, par les minima sociaux et par le conditionnement de la défiscalisation dans les entreprises à des négociations salariales régulières.

Nous devrons surtout jeter très rapidement les bases d’un nouvel ordre économique et définir, enfin, un véritable modèle pour nos territoires : ce modèle économique devra remettre en cause des situations monopolistiques dépassées et ineptes ; il devra libérer et soutenir les énergies créatrices des ultramarins, au profit des ultramarins ; il devra redonner confiance et espoir à notre jeunesse.

Pour permettre ce nouvel ordre économique, l’État devra avoir un rôle moteur.

Il devra actionner les leviers dont il dispose pour la réussite de nos territoires.

Il ne devra plus osciller en permanence entre un assistanat démobilisateur et un lâchage brutal ».


Est-ce dans ces déclarations que le PS trouvera les matériaux nécessaires pour atteindre l’objectif fixé dans cette 14e proposition ?

 

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6 Commentaires sur

Le projet socialiste et les outremers ( 14/30 ) – Vers un système pérenne et équilibré de soutien aux investissements ?

  • Jean-JacquesNo Gravatar |

    c’est beau, la politique:
    Bartolone n’est pas favorable par principe à la défiscalisation, mais il fait fi de ses convictions….
    Penchard tient les mêmes propos
    ça sent vraiment la remise en cause des dispositifs, tout cela

  • Boismery HervéNo Gravatar |

    Il est indéniable que la défiscalisation a contribué à stimuler l’investissement d’une manière globale. Ce système de dopage ne peut être abrogé ou restreint que d’une manière progressive et en aucun cas dans un futur immédiat, sous peine de provoquer un sevrage ou une asphyxie des investissements. En effet, le calcul économique et l’investissement de long terme impliquent un minimum de sécurité juridique. Il serait navrant que les DOM soient considérés comme des régions présentant un risque-pays élevé (au sens des agences de notations) du fait des incohérences et des improvisations gouvernementales qui effraient maintenant même le patronat.
    Pour autant, on ne peut ignorer certains « effets pervers » de la défiscalisation, souvent perceptibles notamment aux Antilles: promotion d’activités purement spéculatives; instrument d’évasion voire de fraude fiscale; sous oublier parfois le blanchiment d’argent sale issu d’activités délinquantes,avec l’émergence d’une « économie casino »…même s’il est excessif de considérer véritablement les DOM comme des « paradis fiscaux ».
    Néanmoins, il faut continuer à attirer les investisseurs et surtout à favoriser la transformation d’une importante épargne locale (réelle ou potentielle) en investissements productifs au service d’un authentique développement… et non plus seulement d’une « croissance sans développement ».
    Les réflexions et les débats doivent s’orienter dans cette direction: concevoir une ingénierie financière au service du développement économique et social.

  • ArsinoéNo Gravatar |

    @Hervé
    Récemment, députés et sénateurs ont voté une nouvelle forme de défiscalisation: celle du FIP DOM. Contre l’avis du gouvernement d’ailleurs.
    A votre avis, fallait-il procéder à la défiscalisation pour cela? le fait que la défiscalisation ne s’adresse qu’à des ultramarins est-il non seulement constitutionnel mais aussi efficient?

  • ArsinoéNo Gravatar |

    Oups, j’ai oublié de dire merci pour la réponse éventuelle de Hervé !

  • Hervé BoismeryNo Gravatar |

    @Arsinoe
    J’ai tardé à vous répondre car j’attendais les derniers développements du psychodrame relatif au FIP-DOM dont le l’ineffable sénateur Marini, Grand Inquisiteur de la Morale fiscale et des privilèges outre-mer, avait obtenu la suppression par la commission des finances de la Haute Assemblée.
    Après mult coups de théatre, l’amendement Marini a été supprimé et un autre amendement visant à étendre le dispositif à l’ensemble des contribuables français a même été adopté par les sénateurs, contre l’avis du charismatique Ministre du Budget François Baroin, qui décidément ne maîtrise pas mieux ses dossiers que les déficits et les comptes publics. A noter que Madame Penchard avait émis un avis diamétralement opposé à celui de son collègue Baroin, ce qui en dit long sur la cohérence de l’équipe gouvernementale.
    En l’état actuel:
    1)Le FIP-DOM est relancé et les propositions de V.Lunel adoptées.
    2)Le bénéfice du FIP-DOM est étendu à L’ENSEMBLE DES CONTRIBUALES FRANCAIS ET NON PLUS SEULEMENT AUX SEULS FOYERS FISCAUX ULTRAMARINS,et cela en conformité avec « LE MODELE CORSE », comme l’a justement souligné J.E. Antoinette, sénateur de Guyane.
    3)Toutefois, cette mesure n’est pas définitvement adoptée puisqu’elle doit être confirmée lors de la commission mixte paritaire qui doit se réunir la semaine prochaine.
    Espérons que Madame Penchard se souvienne de ses engagements et de ceux du Président de la République exprimés en Novembre 2009.
    4)Cette forme de défiscalisation pourrait s’avérer pertinente à condition de la compléter par des mesures susceptibles de garantir l’orientation des investissements vers des activités directement productives ou vers le logement social par exemple,comme le prévoient du reste d’autres dispositifs.
    En outre, pour quelles raisons les investisseurs en outre-mer ne pourraient-ils bénéficier des mêmes incitations que ceux qui investissent en Corse ?
    Au nom de quelle « discrimination positive », la Corse disposerait-elle d’avantages plus substantiels que les DOM ?
    Ces questions doivent être clairement soumises à Messieurs Baroin et Marini.
    Attendons les arguments du Ministre Baroin, par ailleurs porte-parole du gouvernement.
    Cette cacophonie va évidemment à l’encontre de la sécurité juridique sur laquelle doit se fonder une politique rationnelle de développement.
    Singapour aurait-il atteint un tel niveau de développement si les codes d’investissement avaient été modifiés tous les six mois ?
    Egalement, à titre de comparaison, le régime mauricien n’est-il pas cohérent dans ses mesures d’incitation à l’investissement ?

  • ArsinoéNo Gravatar |

    @Hervé:
    merci pour la réponse, claire et précise.
    ce qui m’étonne le plus, dans ce psychodrame du FIP DOM, c’est d’une part, la manière dont laquelle l’événement a été présenté… la presse – et même le communiqué de Lurel – avançait l’IDEE du FIP – alors que le dispositif existe depuis longtemps
    ensuite, venait la question de la défiscalisation. là aussi, au PS comme au gouvernement – c’est un peu la cacophonie. Un certain Bartolone n’est pas fondamentalement partisan de la défisc (comme Penchard); lors du débat à l’AN, la question a été posée : quel soutien financier, défisc ou subventions (pour faire court)
    l’idée de créer un nouveau dispositif de défiscalisation au moment où la course à la suppression des niches fiscales a été relancée, c’est tout de même paradoxal;
    quand bien même la CMP confirmerait le vote des sénateurs, rien n’assure que dans le PLF 2012, ce dispositif ne soit revu.. et les probabilités d’un tel cas de figure sont assez importantes (nouveau dispositif, difficilement chiffrable, concernant encore l’outre-mer… ces arguments vont être produits, à coup sûr)
    cette forte probabilité de non pérennité du dispositif est pour moi très gênante, car cela ne va pas créer les conditions de l’adhésion des investisseurs… dans les mois à venir… l’opération risque donc d’être un cuisant échec… et cet échec pourrait appeler une « réponse » gouvernementale cinglante quant aux autres dispositifs existants…
    mais peut être suis-je très pessimiste??????

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