Le Blog de Pierre VERGÈS

Dans le prolongement des articles consacrés au projet global, voici la présentation des propositions socialistes pour l’outre-mer.

Il appartient aux responsables politiques réunionnais d’envisager de marquer d’une empreinte réunionnaise ce projet présidentiel de 2012. Dès lors, il est ouvert à toute discussion.

La 12e proposition des socialistes est celle-ci :

« Abaisser le coût des liaisons avec l’Europe pour donner aux Outremers un avantage comparatif dans leur environnement régional ».

Lors de sa rencontre avec les fédérations socialistes d’outre-mer (et autres partis comme le PCR),  Martine Aubry évoquait les handicaps structurels de l’outre-mer et notamment :

« l’éloignement, qui induit des coûts de transport élevés, handicapant ainsi la compétitivité externe, donc les exportations ».

Plus loin, elle expliquait :

« En concertation avec tous les acteurs locaux, l’Etat se doit donc d’étudier sérieusement – enfin – toutes les options qui permettront de redonner aux outremers un avantage comparatif en matière de liaisons avec l’Europe, pour abaisser significativement le coût du transport aérien.

Ces mesures seront aussi profitables aux centaines de milliers d’ultramarins qui vivent en métropole et pour lesquels il est aujourd’hui réellement prohibitif ».

La  proposition socialiste est assez incompréhensible.

En effet,  formulée telle qu’elle est, il s’agit purement et simplement de renforcer les liens… avec l’Europe et la France.

Comme si l’outre-mer ne pouvait que vivre par la France (heureusement, le reste des propositions ne dit pas que l’outre-mer doit vivre pour la France).

L’éloignement des outremers par rapport à la France est une réalité géographique incontestable.

Cette distance pèse donc dans le coût des intrants.

C’est une réalité économique elle aussi incontestable.

Mais ce qui est, en revanche, quelque peu plus contestable, c’est l’idée sous-jacente induite par ces mots : l’outre-mer ne peut et ne doit importer ce qui lui manque que depuis la France ou l’Europe.

Bien sûr, la balance commerciale de La Réunion est très déséquilibrée. Pour le seul mois de janvier 2011, le montant des importations s’élevait à 323 M€ pour seulement 17 M€ d’exportations.

L’INSEE a publié la liste des principaux clients et fournisseurs de La Réunion (chiffres de 2009).

Puisqu’il y a déjà des importations avec la Chine, l’Afrique du Sud et les îles de l’océan Indien, pourquoi ne pas réfléchir à une augmentation des importations en provenance de ces pays ?

Il faudra certainement obtenir l’aval de Bruxelles pour certains produits.

Néanmoins, ne vaudrait-il pas mieux s’approvisionner plus près (et moins cher) que loin, donc plus cher ?

Sauf si l’on souhaite être toujours soupçonné de vouloir conserver quelques rentes de situation.

Lors des Etats généraux pour l’outre-mer, en ce qui concerne l’insertion de La Réunion dans les échanges régionaux et dans les flux régionaux de marchandises, de capitaux, d’hommes, il a été suggéré de :

– Veiller à défendre les intérêts de La Réunion dans la négociation de l’APE entre l’UE et le groupe AfOA, en particulier par le maintien de l’octroi de mer, par la protection des produits sensibles et par l’existence d’une clause de sauvegarde ;

– Créer une compagnie régionale de navigation et améliorer la desserte aérienne régionale ;

– Faire jouer au bénéfice des entreprises réunionnaises tous les mécanismes nationaux de promotion et de soutien des exportations ;

– Intégrer La Réunion à l’espace Schengen ;

– Faciliter la délivrance des visas pour les ressortissants des pays de l’environnement régional.

Ces préconisations n’apparaissent pas dans le projet socialiste, même lorsque celui-ci évoque « les capacités d’intervention des outremers dans leur environnement régional » (ce qui fait l’objet de la proposition 28).

En revanche, les déclarations de Martine Aubry font référence à la continuité territoriale.

Dans le projet global du PS, figurait cette proposition :

« Depuis 2007, le Gouvernement a rompu avec les politiques de rattrapage visant à l’égalité que tous ses prédécesseurs, de gauche comme de droite, avaient menées jusqu’alors.

Il faudra les reprendre, en mettant l’accent notamment sur l’abaissement du coût des liaisons avec l’Hexagone, le logement social et les infrastructures de transports ».

Un écho à la proposition de Ségolène Royal en 2007 :

« Garantir la continuité territoriale en imposant aux compagnies aériennes des obligations renforcées de service public ».

Pour 2012, la question de la continuité territoriale est certes abordée par le PS, mais sans présentation des actions à mettre en place, sans calendrier de réalisation ni mesure d’évaluation des dispositifs.

Sans non plus l’affirmation de mettre en place une VRAIE continuité territoriale, au même titre que la Corse.

Enfin, et cela est très révélateur, les mots « continuité territoriale » ne figurent pas dans les documents du PS.