Fiscalité – Mieux comprendre le rôle de l’octroi de mer : une nécessité pour éviter des jugements hâtifs (3ème et dernier volet)

  

0% d’octroi de mer sur le riz

Avant de se lancer dans des jugements définitifs sur le bien-fondé du régime d’octroi de mer, il est nécessaire d’en comprendre la logique, de connaître s’il vise les produits de première nécessité, pour terminer en appréhendant une éventuelle suppression de cet « outil » fiscal.

 

La logique des taux d’octroi de mer   

 

Pour une très grande majorité de produits (83,3% en nombre de codes douaniers, et 72,5% en valeur marchandises), le taux d’octroi de mer est inférieur ou égal à 6,5%.

 

. Une taxation nulle sur les produits de première nécessité, les matières premières. C’est ainsi que riz et pain étaient taxé à  0%.

 

. Une taxation faible sur d’autres produits nécessaires aux bonnes conditions de vie des Réunionnais : c’est ainsi qu’un taux de 4% a été appliqué sur les tôles de couverture, les ciments, les produits pharmaceutiques.

 

. Une taxation plus élevée sur les produits plus « haut de gamme », et sur les produits pour lesquels il existe une production locale.

C’est par exemple le cas sur les savons de toilette (13%), le café torréfié, les huiles raffinées, les glaces et sorbets, les charpentes métalliques, etc.  (18 %),   les jus de fruits, bières, …(28%).

 

. Une taxation très élevée : 51% : sur les alcools et les tabacs…cette taxation élevée concernait également tous les produits de luxe.

 

Jusqu’en mars 2010, sur 5596 produits, il y a un taux de


. 0%  sur 1311 produits ;5% sur 60 produits ;

. 6,5% sur 3292 produits ;

. 13% sur 418 produits ; de 23% sur 153 produits ;

. 28% sur 103 produits ;

. 51% sur 23 produits (cela ne concerne que les alcools, bijoux, armes à feu et tabac).

 

Pas d’octroi de mer sur les produits de première nécessité

 

Jusqu’en mars 2010, la Région, sous l’impulsion de Paul Vergès et des élus de sa majorité, a choisi d’appliquer sur les produits de première nécessité un TAUX ZÉRO, et ceci, afin de ne pas frapper les plus démunis …

 

L’octroi de mer a été mis en place pour protéger l’économie réunionnaise :

 

– la taxe concerne donc les  produits importés,

– les produits fabriqués à La Réunion sont exonérés ou taxés à 0%.

 

Ce système a permis aux entreprises réunionnaises de se développer.

Par conséquent,  cela concourt au maintien des emplois des Réunionnais.

 

Ci-dessous le tableau sur les taux appliqués sur des produits de première nécessité : 

 

Produits

Octroi mer  sur les produits fabriqués à La Réunion

Octroi mer sur les produits importés

TVA sur les produits fabriqués ici  et sur les produits importés

Riz

0%

0%

0%

Lait

0%

0%

2,1%

Beurre

0%

6,5%

2,1%

Pain

0%

0%

2,1%

Morue sèche

0%

0%

2,1%

Huiles végétales raffinées

0%

18%

2,1%

Oignons

0%

18%

2,1%

Graines sèches préparées

0%

18%

2,1%

Eau

0%

6,5%

2,1%

Savons

0%

13%

8,5%

Viandes

0%

0%

2,1%

Volailles

0%

6,5%

2,1%

Jambons

0%

0%

2,1%

Café non torréfié

0%

0%

2,1%

Piment frais, safran, gingembre

0%

18%

2,1%

Sel

0%

6,5%

2,1%

farine

0%

6,5%

2,1%

Sucre de canne

0%

6,5%

2,1%

Aliments pour bébé

0%

0%

2,1%

Pâtes

0%

6,5%

2,1%

Jus de fruits

0%

28%

2,1%

Bière

0%

28%

8,5%

gaz

0%

0%

 

électricité

0%

0%

 

 

Octroi de mer et TVA

 

Dans la composition d’un prix de vente  sont intégrés les éléments suivants : fret, marges dégagées par les uns ou les autres, fiscalité.

Cette dernière se compose de l’octroi de mer et  de la TVA.

 

Octroi de mer 

TVA

En 2007, les recettes d’octroi de mer se sont élevées à 354 millions d’euros

En 2007, la TVA        collectée par l’Etat à La Réunion représente près de 460 millions d’euros 

Les 354 M€  restent à La Réunion

 

Ces 460 M€ repartent dans les caisses de l’État

 

La taxation est nulle pour 1311 produits de première nécessité dont le pain, le riz, le lait, la morue séchée etc.

La taxation est faible (4%) sur  les tôles de couverture, les ciments, les produits pharmaceutiques.

La TVA s’applique à  tous les produits de consommation courante ! 

Seuls sont exclus de TVA certains   matériels d’équipement destinés à l’industrie hôtelière et touristique et certains produits, matériaux de construction, engrais et outillages industriels et agricoles. 

L’impact de la TVA sur le pouvoir d’achat est une évidence puisqu’elle est en final payée par le consommateur 

 

 

À La Réunion, le taux de TVA est de 8,5 % alors qu’en France, le taux est de 19,6 %.

Si l’on ajoute un taux d’octroi de mer moyen de 8,5 %, nous aboutissons à un taux maximal de 17 %, toujours inférieur à 19,6 %.   

 

Existe-t-il une corrélation entre octroi de mer et baisse des coûts ?

 

1°- La suppression de l’octroi de mer signifie-t-elle automatique la baisse du coût des produits ?

 

Supprimer l’octroi de mer ne signifiera pas faire baisser les prix des produits.

 

En effet, en l’état actuel, malgré leur coût, les produits achetés à La Réunion sont moins imposés que des produits achetés en France : 17% de fiscalité à La Réunion et 19,6% en France métropolitaine.

Le taux de TVA est plus faible à La Réunion, justement à cause de la présence de l’octroi de mer.

Rappelons que les recettes de l’octroi de mer permettent aux communes de fonctionner.

 

Mais si l’on supprime l’octroi de mer, rien n’indique que l’Etat ne va pas augmenter le taux de TVA et le mettre à 19,6%, comme c’est le cas pour la très grande majorité des produits en France.

Les produits vendus à La Réunion supporteraient donc alors une fiscalité de 19,6% et pas de 17% comme aujourd’hui.

En clair, les produits pourraient être plus chers.

 

On ne peut pas supprimer un dispositif sans proposer, préalablement, une solution de remplacement.

 

2°- Peut-on envisager la suppression de l’octroi de mer ?

 

En 2014, à Bruxelles, va se négocier la reconduction ou non du dispositif.

Toute évolution doit donc prendre en compte la protection de la production locale, et les recettes des communes.

 

Il faut prendre conscience que la suppression de l’octroi de mer entraînera obligatoirement une augmentation des taux de TVA, qui sont réduits outre-mer, du fait de l’existence de l’octroi de mer.

Ce n’est pas seulement la Région qui a la capacité juridique de décider.

 

Cela concerne toutes les parties : acteurs économiques, communes, Etat et Europe.

 

3°- Ne peut-on pas acheter les produits ailleurs ?

 

Pourquoi aller acheter des produits à 10.000 km (en Europe ou en France) ?

La Réunion ne pourrait-elle pas s’approvisionner des mêmes produits en Afrique du Sud, à Maurice ou dans la zone océan Indien ?

 

Achetés en France, ces produits sont plus chers, car ils doivent être transportés, dédouanés, etc. ce qui génère un coût supérieur.

Et cela alimente les situations de monopole.

Ce qui renforce le processus de renchérissement du coût des produits. 

 

Une autre solution peut et doit être envisagée.

Encore faut-il que La Réunion ait l’aval de l’Europe pour acheter certains produits qui, tout en respectant les normes sanitaires essentielles, ne correspondent pas aux normes européennes.

 

Voilà quelques éléments que je tenais à partager avec vous.

 

Article vu 6 798 fois
1 étoile2 étoiles3 étoiles4 étoiles5 étoiles (Pas encore de votes)
Loading...

2 Commentaires sur

Fiscalité – Mieux comprendre le rôle de l’octroi de mer : une nécessité pour éviter des jugements hâtifs (3ème et dernier volet)

  • NonoNo Gravatar |

    Appliquer un octroi de mer sur des produits qui concurrencent la production locale, d’accord. Mais taxer tous les autres produits, c’est à dire plus de 95% des produits de consommation, est inadmissible !!

    Même en augmentant les taxes de 17% à 19,6% comme mentionné dans votre article, le réunionnais serait quant même gagnant, sur l’ensemble de tous les produits qu’il peut consommer.

    (Par exemple le prix des voitures – octroi de mer pouvant aller jusqu’à 34% !! – matériel Hi-Fi – produits électroménager – et j’en passe…) Jusqu’à preuve du contraire, aucun de ces produits ne sont fabriqués à La Réunion !!

    Pour terminer, en métropole il n’y a pas d’octroi de mer et les communes métropolitaines ne s’en plaignent pas !! Le problème ici, c’est que tout le monde prend le créole réunionnais pour une vache à lait, même les élus locaux, à qui toutes ces taxes profitent !!!

    Qui a dit que La Réunion est un département français ? qui a dit que La Réunion fait partie de l’Europe ? Ce genre de barrières douanières ne sont pas censées exister au sein de l’Europe il me semble non ? (Exception faite de la protection des produits pays bien entendu)

  • MarlyNo Gravatar |

    Ça serait bien de parler de « la Réunion et de la métropole », et non de « la Réunion et de la France ». Car la Réunion fait partie de la France. Merci.

    Ensuite parler d’aller acheter ses produits en Afrique du sud ou à Madagascar c’est bien mais s’est surtout égoïste. La communauté à laquelle notre île region appartient, la Communauté Française, fait preuve de solidarité en opérant d’importants transferts financiers pour notre devellopement ici.

    Comme expliqué l’octroi de mer permet l’essor d’entreprises Reunionnaises au détriments de celles de métropole. Par ce mécanisme l’état souhaite densifier un réseau industriel sur l’île. C’est une sorte de discrimination positive. Et nous, nous devrions aller importer des denrées d’ailleurs pour le reste ? C’est de la solidarité a sens unique. Sauvegardons nos emplois ici et peu importe de ceux de nos compatriotes en métropole ? C’est assez triste.

    J’aime a savoir que mes achats ici favorise l’économie de mon pays quelle soit de Réunion de Bretagne ou Corse….
    Et j’aime trouver les produits que je vois à la télé dans les rayons de mes magasins et pas des produits en anglais pas adaptés a un petit marché francophone d’à peine 800000 âmes.

    Bien cordialement

Vous avez une opinion ? Laissez un commentaire :

Nom *
E-Mail *
Site Web