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2012
Les terres australes françaises, un territoire de richesses convoitées
Catégorie : ÉCONOMIE, OCEAN INDIENCi-dessous une information très intéressante parue sur le site Maxisciences, sous la plume
de Emmanuel Perrin.
Les océans détiennent les clés d’enjeux majeurs du XXIe siècle avec les ressources halieutiques, les hydrocarbures et les minerais rares qui se trouvent dans leurs abysses.
La France est très bien placée avec ses terres australes et antarctiques.
Les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF) s’étendent des îles Eparses sous les tropiques à la Terre Adélie, en passant par les îles australes de Crozet, Kerguelen, Saint-Paul et Amsterdam.
Or, ces faibles étendues de terre donnent droit à beaucoup de mer.
En effet, les Zones économiques exclusives (ZEE) des îles subantarctiques (1,615 millions de km2) et des Iles Eparses (735.300 km2) représentent 23% des ZEE de la France.
Elles participent ainsi grandement au second rang mondial qu’occupe la France, derrière les Etats-Unis.
Selon Vincent Bouvier, directeur général à l’outre-mer, « la mer sera le grand sujet du XXIe siècle« .
D’une part pour ses ressources halieutiques : la pêche au thon, par exemple, notamment dans la ZEE des Eparses dans le canal du Mozambique.
D’autre part pour ses immenses champs gaziers et pétroliers, potentiellement exploitables.
Ceux-ci s’étendent du sud du Kenya au Mozambique et englobent Madagascar et les Seychelles.
Des permis d’exploration pour du pétrole en eaux profondes ont déjà été octroyés en 2008 dans la ZEE de Juan de Nova (une des Eparses) et arrivent à échéance en 2013.
Mais d’autres découvertes majeures font des fonds marins une mine d’or.
On y trouve des nodules polymétalliques et des amas sulfurés, qui connaissent « un regain d’intérêt » de la part des industries minières du monde entier.
Comme l’explique Lionel Lemoine, de l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer), « ces ressources minérales des grands fonds font l’objet d’une forte compétition. La Chine, l’Inde, la Corée ont des initiatives. Il y a des amas sulfurés dans l’océan indien« , ajoute M. Lemoine.
Car ces nodules et autres amas « abritent notamment des « terres rares », ces 17 métaux essentiels aux technologies de pointe [télécommunications, armement, énergies renouvelables] au caractère stratégique« , comme le souligne la commission sénatoriale des Affaires étrangères et de la défense dans un rapport datant de juillet.
Des bases météorologiques installées dès les années 50
En attendant de savoir si ces minerais seront un jour exploités, la France surveille jalousement l’exploitation des très rentables légines et langoustes dans ses ZEE.
Des navires militaires patrouillent même dans ces zones où des mafias de la pêche sévissent.
Côté scientifique, l’installation de bases météorologiques permanentes dès les années 50, a placé la France « en position de leader de la recherche dans cette région du monde« , se réjouit Yves Frénot, directeur de l’Institut Paul-Emile Victor (Ipev, coordonnateur de la recherche dans les TAAF).
« Sur Amsterdam, les mesures de concentration de CO2 y sont effectuées depuis 1980.
C’est la station la plus ancienne au monde après celle d’Hawaï et la seule dans l’Océan indien jusqu’à un ou deux ans« , rappelle le scientifique.
Cette ancienne station joue même un rôle majeur puisque « sans les mesures d’Amsterdam, les modèles d’évolution du climat utilisés par le GIEC fonctionnent moins bien du fait du peu de stations situées dans l’hémisphère Sud« , relève M. Frénot.
Ajouté à cela, l’océan austral « joue un rôle fondamental de « puits à carbone » et nous menons des campagnes pour comprendre ce phénomène« , indique-t-il.
Des territoires encore plus prometteurs dans l’avenir ?
De fait, « les TAAF permettent à la France d’être une puissance effectivement présente sur un espace qui va des tropiques au Pôle Sud« , affirme Pascal Bolot, le préfet administrateur supérieur.
Ces bases permettent « un affichage de souveraineté et d’image, avec une pêche raisonnée et la défense de la biodiversité« , souligne M. Bolot. « Et on ne peut pas présager de l’avenir, des intérêts qui pourraient émerger« , ajoute-t-il, évoquant « le pétrole, des routes commerciales, des implantations satellitaires, etc.«
Finalement, avec un coût annuel global s’élevant à 50 millions d’euros, « c’est un très bon rapport entre le pari fait sur l’avenir et le prix payé« , juge le préfet, n’hésitant pas à parler de « placement de bon père de famille« .