Faut-il interdire les déficits publics ?

 

C’est le titre de l’article publié le 3 mai 2011 sur le site de LCP Assemblée nationale, par Astrid de Villaines. En voici l’intégralité.


L’Assemblée nationale étudie en première lecture le projet de loi qui inscrit dans la Constitution la maîtrise des déficits publics.

Réduire les déficits publics : un objectif qui fait presque consensus.

 

Inscrire cette obligation dans la Constitution, c’est l’objet du projet de loi constitutionnel soutenu par François Fillon et étudié en première lecture mardi 3 mai à l’Assemblée nationale.

 

Il propose de modifier la Constitution « afin de renforcer la gouvernance des finances publiques et de rendre pleinement effectif l’objectif d’équilibre des comptes ».


CE QUE LA LOI VA CHANGER


Si elle est adoptée, cette nouvelle disposition viendra changer les règles de la politique budgétaire française.

 

Les lois de finances et de financement de la sécurité sociale (qui sont votées chaque année) pourront être censurées par le Conseil constitutionnel si elles ne respectent pas les principes de maîtrise des déficits définis par chaque gouvernement à partir de 2012.


L’objectif est clair : envoyer un signal fort aux marchés, à l’Union européenne et notamment à l’Allemagne qui dispose déjà d’une « règle d’or » de ses comptes publics.

 

Après les crises grecques et irlandaises, la France veut faire office de « bon élève » devant ses homologues européens.


Le projet de loi institue aussi des « lois-cadres d’équilibre des finances publiques », d’une valeur juridique supérieure aux actuelles lois de finances, valables sur plusieurs années.

 

Il prévoit aussi d’inscrire dans la Constitution le fait d’adresser les programmes de stabilité budgétaire au Parlement avant leur transmission à Bruxelles.

 

De fait, dès lundi, l’Assemblée s’exprimera par vote sur le programme de stabilité 2011-2014, quelques jours après le Sénat.


ALLER PLUS LOIN QUE BRUXELLES


Cette mesure a d’abord surpris les observateurs français alors qu’une règle à l’échelle européenne existe déjà.

Le pacte de stabilité et de croissance empêche, en théorie, les États d’avoir un déficit public supérieur à 3% de leur PIB.

 

Mais la régulation de Bruxelles est très peu respectée : le pacte n’a pas pu faire éviter à la Grèce la crise qu’elle a connu et le déficit français se situe aujourd’hui à hauteur de 7%.


POLÉMIQUES


L’idée d’inscrire dans la Constitution la maîtrise des déficits publics présente cependant de nombreuses limites.

En temps de crise par exemple, avoir recours à l’endettement public est parfois utile.


Le parti socialiste opposé à la réforme, a d’ailleurs raillé cette mesure de rigueur de la part d’un Président, Nicolas Sarkozy, qui n’a pas hésité à utiliser le déficit public comme levier de relance après la crise de 2008.

 

Jérôme Cahuzac, président socialiste de la Commission des finances à l’Assemblée nationale a fustigé celui qui « n’a pas respecté les règles existantes » mais qui voudrait « imposer une règle de bonne conduite à son successeur en 2012 ».


MÊME À DROITE…


Dans deux des trois commissions saisies mi-avril, des députés UMP ont cependant supprimé une disposition voulue par le gouvernement, au nom de la défense de leurs – modestes – prérogatives.

 

La mesure vise à réserver aux lois de finances l’adoption des mesures fiscales en matière de prélèvements obligatoires.

 

En clair, le Parlement perdrait la possibilité « de faire la moindre proposition de loi comportant des éléments de recettes », comme l’a résumé le rapporteur général UMP du Budget, Gilles Carrez, en fustigeant une « solution intégriste ».

 

« À l’occasion de toute réforme, le monopole empêcherait de débattre des moyens financiers », a renchéri le président UMP de la Commission des Lois, Jean-Luc Warsmann, qui a fait purement et simplement supprimer cet article, comme son homologue Yves Bur (Affaires sociales).


La solution viendra peut-être de M. Carrez (UMP), qui a proposé de couper la poire en deux en commission des Finances.

 

« Si l’un de nos collègues (parlementaires) dépose une proposition de loi, il la dédoublera : l’une portera sur les aspects non financiers, l’autre sur les recettes, et cette dernière sera soumise à la commission des Finances ».

 

L’émotion des députés est d’autant plus grande que leur marge de manœuvre est déjà très encadrée par l’article 40 de la Constitution, qui leur interdit de voter de nouvelles dépenses.


RÉUNIS EN CONGRÈS


Pour être adoptée, cette réforme doit être acceptée par les 3/5 des parlementaires réunis en Congrès. Le gouvernement devrait annoncer sa date prochainement.

 

Il faudra au gouvernement convaincre au moins certains députés de l’opposition, ce qui ne sera pas évident alors que le PS a annoncé qu’il ne votera pas ce projet qualifié de « stupide », par le député socialiste des Alpes de Haute-Provence, Jean-Louis Bianco.


Le gouvernement va donc devoir jouer serré.

                                                                                                                                                 

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2 Commentaires sur

Faut-il interdire les déficits publics ?

  • Jean-JacquesNo Gravatar |

    cela ne changera strictement rien… positivement, car si pour limiter les déficits, on dimunie les dépenses, et on augmente les recettes, les leviers à actionner seront toujours ceux liés directement à la vie quotidienne des Français et bien sûr les plus démunis et les classes moyennes.

  • ArsinoéNo Gravatar |

    a lire : le manifeste d’économistes atterrés. Page 30  » il est faux d’affirmer que tout déficit public accroît d’autant la dette publique ou que toute réduction du déficit permet de réduire la dette. si la réduction des déficits plombe l’activité économique, la dette s’alourdira encore plus ». (…)
    avec cette préconisation: maintenir le niveau des protections sociales, voir les améliorer (assurance chômage, logement….)
    et celle-ci
    « accroître l’effort budgétaire en matière d’éducation, de recherche, d’investissements dans le reconversion écologique… pour mettre en place les conditions d’une croissance soutenable, permettant une forte baisse du chômage »

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