Entendu sur France Inter : Sarkozy, entre gravité tranquille et fausse modestie

 

   Intéressante analyse de Anna Cabana, grand reporter à l’hebdomadaire Le Point, dans l’émission « Demandez le programme », ce mercredi 17 novembre. Lecture !

 

« Hier soir, Nicolas Sarkozy s’est exprimé pendant 1h30 à la télévision en direct de l’Elysée pour donner le cap des dix-huit mois à venir.

 

Il a voulu se montrer plus présidentiel que jamais.

Un jour, il se présidentialise, l’autre jour il se re-présentialise… 

Il faut quand même remarquer une chose : le néologisme a été popularisé pour Nicolas Sarkozy.

 

Parce qu’avant, sous Jacques Chirac, je ne parle même pas de l’ère Mitterrand, il ne serait pas venu aux commentateurs l’idée de gloser sur la présidentialisation.

 

Le Président faisait Président, c’était une évidence qui allait sans dire.  

 

Aujourd’hui, c’est différent.

 

Le pays est dirigé par un caïd politique dont on scrute les mouvements d’épaule, les petits sourires en coin, les bouffées de colère mal réprimées, et il faut dire qu’hier soir, tout ça était mieux contrôlé que jamais.

 

Sarkozy a voulu démontrer qu’il s’était remanié lui-même.

 

Alors bien sûr, il est encore loin de l’affabilité enveloppante d’un Chirac, mais il s’est efforcé d’afficher une gravité qui se voulait tranquille, une fausse modestie de bon aloi.

 

Comme toujours chez lui, le trait était presque trop forcé : trop de subjonctifs imparfaits, qui sont censés vous présidentialiser un homme, trop d’invocation de l’intérêt général –une demi-douzaine– et enfin, et peut-être surtout, trop de compliments sur François Fillon.

  

Sur Fillon, il a même dit : « Nous travaillons ensemble sans aucun nuage depuis des années » ; « Nous avons une confiance totale l’un dans l’autre ».

 

C’est la vraie nouveauté : les mots doux de Sarkozy pour Fillon.

 

Jamais, en trois ans et demi, le Président n’avait manifesté publiquement autant d’égards pour ce Premier ministre qu’il considérait comme un « collaborateur » et qu’en petit comité il traitait de « nul », de « planqué », « d’inexistant ».

 

Hier soir, Fillon était érigé au rang de « meilleur Premier ministre de la France ».

Sarkozy est même allé jusqu’à parler, pour la première fois, du « gouvernement de François Fillon » !

  

Alors pas étonnant que Fillon, vingt minutes à peine après la fin de l’intervention présidentielle, ait été le premier à publier un communiqué pour encenser la prestation du chef de l’Etat.

 

Ces deux hommes, qui ne se sont jamais aimés, rivalisent maintenant d’amabilités.

 

Dimanche dernier déjà, on a vu Fillon, quelques minutes seulement après avoir été renommé Premier ministre, proclamer sa fidélité à Sarkozy dans un communiqué grandiloquent. 

 

La vérité, c’est que Sarkozy avait conditionné la reconduction de Fillon à cette déclaration d’amour publique.

Caprice de Prince.

 

L’autorité, c’est bien connu, n’a jamais autant besoin de cautions verbales que lorsqu’elle faiblit.

 

Vous suggérez que le rapport de force entre les deux hommes s’est inversé ?

 

Ce rapport de force a en tout cas suffisamment évolué pour que Sarkozy expose en direct à la télévision sa volonté de mieux « répartir les rôles » -ce sont ses mot- entre Fillon et lui.

 

Un peu plus et il nous disait qu’après trois ans et demi d’hyper présidence, on allait en revenir à la pratique traditionnelle de la Vème République.

 

Mais attention, on n’est pas obligé de le croire… »

 

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6 Commentaires sur

Entendu sur France Inter : Sarkozy, entre gravité tranquille et fausse modestie

  • PalhumourNo Gravatar |

    Sarkozy s’est remanié lui même
    prochaine étape: l’auto- dissolution ?

  • Jean-JacquesNo Gravatar |

    en maintenant Fillon au poste de premier ministre, Sarkozy l’empêche de se positionner comme « présidentiable ».
    Cela lui fait un adversaire de moins. Idem pour Juppé, déjà assez impopulaire.
    Borloo comme Devillepin ont les coudées franches maintenant

  • EricNo Gravatar |

    Et si l’on posait le problème ainsi

    Fillon garde Sarkozy?

  • ArsinoéNo Gravatar |

    moi, j’ai bien aimé le lapsus de Sarko : « Ma détermination n’a rien changé. »
    quel bel aveu inconscient d’échec.

  • plumitifNo Gravatar |

    entretien avec des journalistes choisis sur le volet, pas de ceux qui attaquent, des tout gentils, bien dociles. même des copains (il a écrit un livre avec Michel Denisot, me semble-t-il),
    lequel Denisot s’est vautré très complaisamment devant Sarkozy, avec une flagornerie étonnante (je ne me souviens plus de la formule exacte, mais en substance, cela signifiait que Sarko était plus intelligent que tout le monde
    un grand entretien, à diffuser à titre pédagogique dans toutes les écoles de journalisme

  • re - plumitifNo Gravatar |

    Oups, j’ai oublié de dire une autre chose:
    les ROMS, c’est la faute aux media, nous avons mal compris. nous avons monté l’affaire en épingle; c’est même nous qui avons stigmatisé les ROMS
    fallait le faire !

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