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2010
À propos du « Conseil supérieur de la commande publique : des chiffres contestables pour préparer bientôt un « coup de l’État » ?
Catégorie : BTP-Routes-Transports, POLITIQUE LOCALE
La Préfecture a donné des chiffres sur les montants des opérations d’investissement des collectivités territoriales et leur niveau d’engagement.
Devant le grand écart constaté, on fera appel à « sainte Marguerite » pour réaliser un miracle : débloquer, avant la fin de l’année, les financements programmés, mais pas encore utilisés.
Le tout sur un fond de camouflage des arrières-pensées de l’État.
Aux représentants du BTP, le représentant de l’État a déclaré :
« l’État a mesuré les opérations d’investissement des collectivités qui pourraient intervenir en 2010. Cet exercice a permis de totaliser 530 opérations pour près d’un milliard d’euros. Mais, au 31 août dernier, seuls 35% de ce montant étaient engagés ».
LA PRÉFECTURE CIBLE LES COLLECTIVITÉS
D’où sortent ces chiffres ? Ont-ils été établis avec le concours des premières concernées, les collectivités ? Non.
Or, la conviction de la Préfecture est faite : la responsabilité principale dans la faiblesse de la commande publique incombe aux élus locaux.
C’est vrai au regard de plusieurs des gros chantiers programmés puis abandonnés. Mais, de là, à généraliser, c’est une autre affaire.
Le discours est éculé. Il est tenu depuis l’arrivée de la nouvelle majorité.
Affirmant que l’État assumait ses responsabilités dans la construction de logements sociaux, Yves Jégo mettait en cause les communes ou leurs regroupements dans leur incapacité à fournir du foncier.
Il annonçait que l’État leur fournirait gratuitement ses terrains disponibles.
Quelques mois plus tard, constatant les difficultés du logement social, Mme Penchard expliquait que l’instruction des dossiers prenait trop de temps. Elle promettait de se saisir du dossier.
Depuis, le discours est… il a été question de cessions, mais pas… à titre gratuit !
Aujourd’hui, la Préfecture tient un langage quasi identique : le problème du logement en général viendrait d’un trop long délai à instruire les permis de construire.
Lors du mouvement de protestation contre la hausse du prix des carburants, la Préfecture avait aussi ciblé la Région, la présentant comme le principal responsable. Il y a donc une certaine constance dans l’attitude de l’État.
« SAINTE MARGUERITE » POURRA-T-ELLE RÉALISER UN MIRACLE ?
Pour remédier au problème de la commande publique et donner l’impression de faire quelque chose, et surtout devant le mécontentement grandissant, on va installer une haute autorité de la commande publique.
Elle reprend l’essentiel de l’existant : les missions de l’observatoire de la commande publique ou de l’observatoire des délais de paiement.
Son côté folklorique tient en la désignation d’une présidente appelée à obtenir dans les trois mois qui restent ce qui n’a pu être fait : débloquer en 2010 les 750 millionsnon encore utilisés.
« Sainte Marguerite » pourra-t-elle réaliser un miracle ?
Avant même son installation, Margie Sudre a montré ses limites.
Sortant de son rôle d’arbitre, elle tient sur RFO Radio un discours politique et partisan.
Elle exprime la volonté de se substituer aux donneurs d’ordre, en souhaitant dicter aux collectivités les procédures à suivre en matière d’appels d’offres.
À ce niveau, la question la plus importante qui vaut est celle-ci :
Si on n’utilisait pas tout ou partie des 750 millions annoncés par la Préfecture et a supposer qu’ils proviennent en grande partie de crédits d’État, l’État s’engage-t-il à les reconduire pour 2011 ou bien va-t-il prendre prétexte de leur non utilisation pour les annuler ?
C’est là-dessus qu’on aimerait entendre Margie Sudre.
OPÉRATION CAMOUFLAGE
L’apparition de Margie Sudre dans le paysage avec ses discours partisans, sa volonté de transformer la commission en un «super gendarme » au-dessus des collectivités est un élément d’une stratégie.
Les arrière-pensées électoralistes au bénéfice de sa personne sont évidentes.
L’opération de camouflage pour et au service de l’État l’est moins.
En premier lieu, la commande publique est réduite essentiellement aux chantiers de construction.
C’est une réelle préoccupation. Mais pourquoi exclure d’autres aspects de la commande publique comme l’achat de produits ou de marchandises ?
Il serait alors difficile de dire que les collectivités ne fournissent pas le système de restauration scolaire dont elles sont responsables. Ce n’est qu’un exemple.
Mais, on vise surtout à camoufler la part de responsabilité de l’État. Ceci à deux niveaux :
1° – L’État – alors que sa responsabilité et son financement étaient acquis – n’a-t-il pas laissé faire, sinon encourager, l’abandon de chantiers ? Citons les plus symboliques : la MCUR ou le Tram-train.
2° – Face à la crise, l’État assume-t-il toute sa part de responsabilité ?
QUEL PLAN DE RELANCE DE L’ÉTAT ?
Ne parlons pas du gel, à partir de l’année prochaine, de ses subventions destinées aux collectivités. Ni des atermoiements sur la défiscalisation, notamment pour la construction de logements.
Ne parlons pas des effets sur l’économie locale du non remplacement d’un fonctionnaire partant à la retraite sur deux. Personne n’a encore fait les calculs.
Mais on doit bien pouvoir mesurer les conséquences sur la consommation globale, de la diminution des rentrées fiscales et de la disparition de milliers d’emplois dans la fonction publique.
En 2008,à l’amorce de la crise, Paris avait pris l’initiative d’un plan de relance dont un chapitre était consacré à l’outre-mer.
Il avait débloqué des crédits, certes insuffisants. Quels sont ses engagements pour 2010 ? Où sont-ils ?
On parle avec insistance du Grand emprunt. Que peut espérer La Réunion ?
Il est donc toujours plus facile de mettre en cause les collectivités que de faire état… pour l’État, de ses propres responsabilités. Cela n’est pas innocent.
UNE RECENTRALISATION QUI NE DIT PAS SON NOM ?
Avec la mise en place du Conseil supérieur de la commande publique, le côté folklorique c’est bien sûr la désignation de Margie Sudre comme présidente. L’essentiel est ailleurs.
Il est dans la domiciliation de cette instance à la Préfecture, de son suivi administratif par des…fonctionnaires de l’Etat et du nouveau rôle qu’il aura à assumer.
Le Conseil sera doté d’un dispositif d’ingénierie technique et financier censé aider les collectivités à monter leurs projets et à trouver des financements. C’est une utilité certaine.
Mais, pourquoi la structure est-elle chapeautée par l’État ?
Il faut ici se souvenir d’une mesure essentielle prévue par le CIOM : celle qui donne au Préfet des compétences nouvelles, lui permettant de se substituer aux collectivités en cas de défaillance de celles-ci.
On parle peu de cette volonté de recentralisation.
Cette volonté de recentralisation est plus forte outre-mer.
Elle s’exprime avec les nominations de préfets au développement endogène ou à la cohésion sociale et ses compétences extraordinaires accordées aux préfets.
Elle s’est manifestée sur la question du plan d’élimination des déchets ménagers, où le Préfet veut imposer l’incinérateur.
INTERROGATIONS SUR LES OBJECTIFS RÉELS DE L’ÉTAT
Le Conseil est placé directement sous l’aile de l’État.
Médiatiquement, il est fait état de chiffres non contrôlés qui permettent de cibler les collectivités locales.
La création du Conseil est faite le jour où Didier Robert publie son « plan de relance ».
Sa présidente (choisie mais non élue) ne dissimule pas ses ambitions de régler des comptes politiques.
Tout cela additionné ne peut que nourrir des craintes : La Réunion est pourvue d’un machin sorti de nulle part, sans existence légale, chargée de mieux asseoir l’autorité de l’État sur les collectivités locales alors que sa présidente n’écarte pas d’agir de manière partisane.
Cela donne à réfléchir.
Benoist Apparu, que personne ne connaît, mais qui néanmoins est secrétaire d’Etat au Logement, a dit, le 2 septembre dernier, vouloir mobiliser 500 terrains publics pour construire 50.000 logements d’ici … 2012 (la date me dit quelque chose…). Il a reconnu que les difficultés sur leur utilisation venaient le plus souvent de problèmes ou de blocages à caractère administratif ou de difficultés d’ordre environnemental. En termes de « fournisseurs » de terrains, les ministères de la Défense, de l’Education nationale et de l’Ecologie représentent à eux seuls plus de la moitié des mises en chantier. Pour accélérer le rythme, Benoist Apparu a demandé aux préfets, « même si certains projets sont complexes, de coordonner au plus vite le travail entre les maires, le ministère ou l’établissement vendeur et France domaine ». Les opérations initiées dans ce cadre pourront notamment s’appuyer sur un nouvel outil, mis en place pour l’accélération des programmes de construction et d’investissement publics et privés : le bail emphytéotique administratif destiné à la construction de logements sociaux. Ça c’est pour la France. Mais, quelle est l’adaptation de cette initiative outre-mer, où les blocages sont tout aussi importants ?
Le Quotidien de La Réunion » publiait le 23/11/2009 une ITW de Penchard.
Parmi les questions posées, celle-ci : « Le BTP devrait perdre 7000 emplois cette année suite à l’effondrement du marché. L’Etat est-il prêt à participer à la relance de la commande publique en s’engageant au delà des 47 M d’euros prévus par le plan de relance ? ». La réponse de la ministre est significative : « Il est extrêmement réducteur de limiter l’appui de l’Etat à la commande publique aux seuls crédits d’investissement du plan de relance. Je vous rappelle que, dans ce plan, le Gouvernement a accéléré le versement du fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) aux collectivités. C’est de l’investissement en plus pour les collectivités. Le Premier ministre s’est engagé le 17 novembre devant les Maires de France à reconduire ce dispositif en 2010. Par ailleurs, La Réunion a bénéficié en 2009 de plus de 88 M€ de crédits au titre de la ligne budgétaire unique. Et, pour 2010, conformément à une décision du conseil interministériel de l’outre-mer, les crédits de la ligne budgétaire unique pourront être augmentés. Le Gouvernement joue pleinement la carte de la relance de la commande publique. Mais j’insiste sur le fait qu’il ne sert à rien d’obtenir plus de crédits, s’ils ne sont pas investis rapidement. De ce point de vue, les acteurs locaux doivent améliorer l’efficacité du dispositif de la commande publique car je constate que les crédits de l’Etat tardent parfois à être consommés ».
Quelles sont les 530 opérations annoncées par le préfet ? De qui émanent-elles ? Probablement des collectivités locales.
Que propose le gouvernement pour les hôpitaux, l’université, et tous les autres bâtiments publics ? Où est son implication dans tout ça?
Au début de la crise, le gouvernement, à grand renfort de communication, a décidé d’un plan de relance. Cela s’est traduit notamment par des plans d’actions « ciblés ». Le CIACT (Comité interministériel d’aménagement et de compétitivité des territoires) s’était ainsi réuni le 2 février 2009 pour parfaire le« Plan de relance de l’économie » de l’outre-mer. Il voulait amplifier le financement d’opérations d’investissement. Le communiqué émis alors était assorti d’une « Première liste d’opérations programmée pour bénéficier des crédits mis en place au titre du plan de relance dans le cadre du FEI » (fonds exceptionnel d’investissement). Pour La Réunion, le gouvernement indiquait qu’il voulait procéder à la « Couverture en panneaux photovoltaïques de la route des Tamarins ».
Où sont les panneaux ?
Le ministre de la relance, Devedjian, a publié mi-août une sorte de bilan d’exécution du fameux plan de relance. Il donne des chiffres. On y apprend que l’Etat a piloté plus de 1.500 chantiers, pour plus de 3,8 milliards d’euros… mais il n’y a aucune indication de ces chantiers. A t on vu une trace de quelque chose à La Réunion ?
C’est ça la ri-lance :
la rigueur pour l’investissement outre-mer,
la relance pour des personnalités laissées pour compte (ou pour solde de tous comptes…).
Mme Sudre pourrait peut être commencer son travail en nous présentant le bilan à mi septembre des 34 « projets » retenus à La Réunion dans le cadre du plan dit de relance.
A toutes fins utiles, précisons qu’elle peut trouver ce document sur le site de la préfecture
On vient de me signaler quelque chose de fort intéressant : dans le document relatant la création du « conseil », mme sudre est présentée comme… ancienne ministre.
C’est dire l’efficacité des techniques d’effacement de mémoire de DR : à la préfecture, on a même oublié que notre Margie a aussi été.. présidente de région.
Le conseil aura son secrétariat à la préfecture… c’est pour cela que c’est « une organisation indépendante »…