Pour une grande politique des déplacements à La Réunion : attention aux « fausses bonnes idées » ! (5ème partie)

 

   Je voudrais pour cette semaine vous faire partager une analyse réalisée par la FNAUT (Fédération Nationale des Associations d’usagers des Transports).

Créée en 1978, cette fédération rassemble aujourd’hui 150 associations implantées dans toutes les régions françaises.

 

Association de consommateurs agréée, la FNAUT conseille et défend les usagers de tous les modes de transport et les représente auprès des pouvoirs publics et des entreprises de transport.

 

Groupe de pression d’intérêt général, elle s’efforce d’infléchir la politique des transports et de l’aménagement du territoire.

 

Je vous invite à prendre connaissance d’un certain nombre de « fausses bonnes idées » recensées par la FNAUT.

Certains exemples nous seront d’une grande utilité dans un avenir proche, afin de ne pas « dérailler » dans la mise en oeuvre d’une grande politique de déplacements à La Réunion, dans un espace contraint, devant faire face à l’augmentation démographique et à la croissance du parc automobile.

 

Exemple 17 : Le car peut remplacer le train ? Une analyse incomplète !

 

Dans de rares cas (aux heures creuses sur des lignes peu fréquentées), le car, moins consommateur d’énergie et moins coûteux, est plus pertinent que le train.

 

Mais d’une manière générale, le car n’offre ni la capacité à encaisser les pointes de trafic, ni la vitesse, ni le confort du train.

 

Les transferts sur route sont pernicieux: ils s’accompagnent d’une forte perte de clientèle, de l’ordre de 30 à 50% : en définitive, leur bilan économique, social et écologique est négatif.

 

À l’inverse, lors de la réouverture de la ligne Nantes-Pornic, le volume de la clientèle a triplé.

 

Exemple 18 : Développer les aéroports de province ? Sans effet sur les aéroports parisiens !

 

C’est l’un des arguments avancés pour justifier la construction de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes.

 

Mais un report massif du trafic des passagers de Roissy ou Orly sur les aéroports de province est illusoire.

 

Il est théoriquement possible, mais comment le faire accepter par les passagers  franciliens  et  par  les  riverains  des  aéroports  de  province  ? 

 

Les  relations  intra-européennes directes (Marseille-Londres) ou touristiques moyen-courrier (vers l’Espagne, le Maghreb,…)  se  développent  rapidement  depuis  la  province,  le  passage  par  Paris  est  déjà minoritaire : ce phénomène ne s’est accompagné d’aucun ralentissement de la croissance du trafic parisien.

 

D’autre part, le potentiel de trafic est trop faible en province pour justifier des dessertes intercontinentales fréquentes ; aucun aéroport ne peut y jouer le rôle de Münich ou de Manchester : Nice est saturé, Lyon est trop proche de Paris et concurrencé par Genève.

 

Exemple 19 : Road-Shift-Rail ? Une usine à gaz pour le ferroutage !

 

«Innovation de rupture», le Road-shift-Rail (R-shift-R) prétend offrir «une solution globale de transport  combiné  compétitive  et  fiable». 

 

«Il  dissocie  dans  le  mode  opératoire  la  fonction d’embarquement/débarquement de la fonction de chargement/déchargement du wagon, ce qui autorise et implique la   multiplication   des   postes   d’embarquement/débarquement.  

 

Rendant uniforme  le  profil  bas  des  contenants  roulants,  ce  qui  rend  possible  la  manutention  sur terminal par le même système de portage, ce mode de travail en séries/parallèle doit permettre de proposer un service dont la tarification est comparable à celle de la route».

 

Etudié dans le cadre  du  PREDIT  par  le  Laboratoire  d’Economie  des  Transports  et  l’INSA  de  Lyon,  ce concept fumeux, d’une ahurissante complexité, a donné lieu à un rapport de 418 pages publié début 2008 mais n’a fait l’objet d’aucune application depuis lors.

 

Augmenter la productivité du transport ferroviaire de fret est sans doute nécessaire pour enrayer   son   déclin.  

 

Un   groupe   d’experts   animé   par   Philippe   Essig   recommande   la généralisation de l’attelage automatique (utilisé dans le monde entier sauf en Europe) et du frein à commande électronique pour faire circuler des trains plus longs et plus lourds.

 

Cette démarche  réaliste,  d’un  coût  raisonnable,  ne  nécessiterait  pas  d’innovation  technologique.

 

Quant au transport combiné lui-même, il est absurde de ne pas concentrer les efforts sur le combiné  classique  et  l’autoroute  ferroviaire  sur  la  base  du  concept  Modalhor. 

 

Ces  deux versions du combiné se complètent parfaitement : pourquoi inventer de nouveaux concepts qui ne s’imposent pas ?

 

Ceci étant, le fret ferroviaire ne sera pas sauvé par la seule technique :

 

– il  faut  sauvegarder  la  capillarité  du  réseau  ferré  pour  préserver  l’avenir,

 

multiplier  les opérateurs ferroviaires de proximité (OFP)

 

– et assainir les conditions de concurrence rail/route.

 

Exemple 20 : Les canaux à grand gabarit ? Le rail disponible pour moins cher !

 

La voie d’eau est moins bruyante et polluante que la route, et moins consommatrice d’énergie (mais  nettement  plus  que  le  rail  selon  l’ADEME). 

 

Il  est  donc  raisonnable  de  chercher  à développer le transport sur les fleuves, qui disposent d’importantes réserves de capacité.

 

Les canaux   inter bassins   sont   par   contre   beaucoup   moins   pertinents   économiquement,   plus agressifs pour l’environnement car, en France, ils doivent franchir des seuils élevés, et très coûteux (Seine-Nord : 4,5 milliards d’euros ; Saône-Moselle : 10 à 13).

 

Alors que le trafic de conteneurs entre un grand port et son arrière-pays industriel peut être énorme et justifier des aménagements  fluviaux  et  ferroviaires  importants,  les  trafics  interbassins  sont  bien  plus faibles   et   peuvent   être   assurés   par   le   rail,   celui-ci   disposant   de   réserves   de   capacité mobilisables à un coût plus modeste.

 

Source : http://www.fnaut.asso.fr/

 

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1 Commentaire sur

Pour une grande politique des déplacements à La Réunion : attention aux « fausses bonnes idées » ! (5ème partie)

  • Martin NadaudNo Gravatar |

    Bonjour
    Connaissant bien le projet R-shift-R je pense vos considération sont erronée, et que vous disqualifiais votre association. Vous n’avez certainement que peu d’expertise, le concept Modalhor prend un temps fou au chargement déchargement et surtout nécessite des quai incompatible avec les gares locales pour des livraisons généralisées le long des lignes

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