2011, année des outremers… et pourtant une indifférence des médias nationaux !

  Je voudrais à ce sujet revenir, à titre d’exemple, sur un évènement important auquel j’ai pu assister, au nom du Conseil général de La Réunion : la commémoration de l’esclavage, crime contre l’Humanité, le 10 mai 2011, dans les jardins du Luxembourg.

 

J’ai eu l’occasion de le dire : le Président de la République Nicolas Sarkozy a fait un beau discours ce jour-là (j’en ai publié l’intégralité sur mon blog le 10 mai 2011 sous le titre « La France et « ses » outre mers : une Histoire d’Amour « ambigüe… »).

 

Un plaidoyer pour le devoir de mémoire dénué de la condescendance du fameux discours de Dakar, en juillet 2007.

 

Comme le souligne la journaliste camerounaise Kidi Bebey et le journaliste sénégalais Alex Ndiaye dans une tribune libre sous le titre « 10 mai 2011: Pourquoi la commémoration de l’esclavage est passée inaperçue » parue dans SlateAfrique :


« Pour une fois, le président français a embrassé l’histoire et fut au rendez-vous de cette journée nationale de commémoration.

Journée inscrite dans le calendrier républicain depuis mai 2006 et qui fait écho à la loi Taubira de 2001 qui assimile la traite humaine et l’esclavage à des crimes contre l’humanité.


Une stèle commémorative a même été dévoilée dans les jardins du Luxembourg par le premier des Français.

 

Et pourtant, cette journée est passée quasiment inaperçue dans les médias français. Certains diront que l’ombre de François Mitterrand, dont on fêtait le 30ème anniversaire de l’accession au pouvoir, a occulté le reste de l’actualité. »

 

« La france a la mémoire sélective » 

 

Et les deux journalistes de rajouter :


« Mais si Mitterrand est, malgré lui, responsable, il n’est sans doute pas le seul coupable.

 

Si l’on oublie de commémorer la traite négrière, l’esclavage et leurs abolitions, c’est malgré tout parce qu’il demeure plus que jamais difficile d’évoquer en France les pages les moins glorieuses de l’histoire.


Ah ! Que n’a-t-on pas écrit sur l’Allemagne nazie, sur les ravages du communisme, sur la guerre du Vietnam, ou le conflit au Proche-Orient ! Tant que les barbares sont étrangers, la France garde un visage humain.

 

L’examen de conscience n’est pas le fort des descendants de Rousseau et Voltaire, qui ont toujours du mal à évoquer la guerre d’Algérie, les ravages du colonialisme, la France vichyste et collaborationniste ou encore les sanglantes répressions comme celles que mena la France au Cameroun et à Madagascar.


L’image de marque de la «patrie des droits de l’homme» ne souffre aucune atteinte à son intégrité.

Si bien que l’on en arrive à ce paradoxe : l’histoire de France, c’est très bien, mais certains chapitres ne regardent pas tout le monde de la même façon.


Cette difficulté à aborder les événements les plus sombres conduit naturellement à occulter l’histoire de l’esclavage.

Et ceux qui se battent pour que l’on en parle malgré tout sont forcément les plus concernés.

 

Il leur est donc reproché par la majorité d’en faire une question émotionnelle —voire une revendication communautaire—, ce qui au final permet de les rejeter, en refusant au passage la repentance.


À cause de ce cercle vicieux, la majorité des Français continue d’ignorer des pans entiers de son histoire —de même que la majorité des journalistes.

La couverture médiatique de la journée du 10 mai, notamment sur les radios et chaînes de télévision du service public, n’aura pas été à la hauteur de l’événement.


Par ailleurs, si cet événement national est passée inaperçu, c’est en partie aussi parce que Nicolas Sarkozy n’a pas habitué les Français à évoquer les questions de la traite négrière ou du racisme.

 

Celui qui, dès sa victoire à l’élection présidentielle de 2007 prenait une posture de défense en disant vouloir « en finir avec la repentance qui est une forme de haine de soi » n’est pas forcément audible par l’opinion lorsqu’il invoque le nécessaire «devoir de mémoire» à propos de l’esclavage.


Enfin, à un an de l’élection de 2012, la présence de Nicolas Sarkozy dans les jardins du Luxembourg semblait aussi tenir de l’opportunisme politique.

Si bien qu’il faudra davantage qu’un discours, aussi bon soit-il, pour que les Français en apprennent un peu plus sur 300 ans de leur histoire. »


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