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2011
Les filières agricoles des DOM défendues au Sénat
Catégorie : Agriculture
Il a beaucoup été question de l’outre-mer, ces derniers jours au Sénat.
En effet, les parlementaires ont adopté deux textes émanant d’élus Martiniquais : en premier lieu, la proposition de loi du sénateur Serge Larcher sur les compensations aux effets agricoles des accords commerciaux de l’Union européenne (votée à l’unanimité) et en second lieu, celle du député Serge Letchimy sur le logement indigne.
Mercredi 3 mai, le Sénat a adopté à l’unanimité une résolution européenne, déposée par les sénateurs Serge Larcher (Martinique / socialiste) et Éric Doligé (Loiret – UMP), président et rapporteur du Comité de suivi de la mission commune d’information sur la situation des DOM de 2009.
Cette résolution porte sur la filière agricole.
Suite à l’accord signé à Genève en 2009 portant sur la banane et ceux de mars 2010 conclus entre l’Union européenne et l’Amérique centrale d’une part, la Colombie et le Pérou, d’autre part, la production ultramarine était très menacée, puisque permettant des importations de banane, canne, etc. plus faciles qu’auparavant, tant en terme de coût que de quantité.
Ces accords n’étaient ainsi pas cohérents avec le POSEI (programme d’options spécifiques à l’éloignement et l’insularité).
Le 24 septembre 2010, la commission de Bruxelles avait transmis au Parlement européen un projet de réforme du POSEI.
Rappelons que le POSEI représente une aide forte pour l’outre-mer (278 M€ pour 2010).
Ce POSEI est en place depuis près de 20 ans.
Mais le texte proposé par l’Europe ne tenait pas compte, selon Éric Doligé, de « l’impact potentiellement dévastateur sur l’agriculture des RUP » de ces récents accords commerciaux.
En effet, en échange d’un meilleur accès essentiellement pour ses produits industriels et ses vins et spiritueux, l’Union européenne a accordé aux deux États andins une amélioration de leur potentiel d’exportation de bananes, de sucre, de rhum et d’autres produits comme ceux de la pêche, qui menace le cœur des économies ultramarines.
La France estime à 40 millions d’euros par an le besoin de compensation de pertes de revenu et de restructuration pour la filière.
Or, la Commission européenne n’envisage aujourd’hui qu’une compensation de 4 millions d’euros, soit dix fois moins !
Pour mémoire, la banane représente 57% de la production agricole en Martinique et la canne à sucre 20,3% de la production agricole en Guadeloupe.
Le commerce extérieur des DOM est lui aussi étroitement dépendant de ces produits : ainsi, pour La Réunion, le sucre représente 38,5% des exportations en valeur.
Comme l’a déclaré M. Serge Larcher, « il nous faut sauvegarder l’essentiel : les dizaines de milliers d’emplois qui sont en jeu derrière ces pourcentages ».
En janvier, le Sénat s’est saisi de cette affaire afin de proposer une résolution européenne pour dénoncer, selon le sénateur Serge Larcher, « le désintérêt de la Commission à l’égard des effets de ces divers accords sur l’agriculture des DOM ».
La résolution vise donc à demander compensation du préjudice subi par l’outre-mer à cause de ces textes.
Elle demande également l’inclusion de mécanismes de sauvegarde opérationnels et la réalisation systématique, par la Commission européenne, d’études d’impact avant toute conclusion d’accords commerciaux mais aussi au cours de leur mise en œuvre.
M. Bruno Le Maire, ministre de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire, a salué son adoption, estimant que cette résolution du Sénat arrivait « à point nommé ».
Espérons que le ministre puisse tenir ses engagements, à savoir « maintenir la pression sur la commission européenne », comme le lui demandait Serge Larcher. Et que cette résolution soit sans cesse invoquée par le gouvernement français.
a quand le vote d’une résolution concernant les dégâts causés par l’application sans concertation avec La Réunion des accords ACP?
La conclusion prochaine d’accords entre l’UE et les pays latino-américains fournisseurs de bananes soulève à juste titre des inquiétudes sérieuses quant à l’avenir de cette filière dans les RUP de l’Europe.
Pourtant,l’Espagne,le Portugal et la France avaient fait preuve de « flexibilité » en janvier 2009 en acceptant que la deuxième partie de la baisse de droits ne soit pas strictement liée à la conclusion du Doha Round au sein de l’OMC.Cette ouverture était elle-même conditionnée à une pause permettant aux filières européennes de s’adapter.En outre, les trois gouvernements souhaitaient qu’il soit tenu compte des contraintes environnementales que doivent respecter les productions communautaires,qui impliquent des obligations bien supérieures à celles des autres régions productrices,soumises à l’exploitation des multinationales de l’agro-alimentaire.
Or, les offres de la Commission ne remplissent pas ces conditions.
En tout état de cause, les baisses de droit envisagées vont provoquer une perte significative de revenus pour la filière banane qu’il faudra compenser par un réajustement du soutien communautaire.
Au-delà du cas exemplaire de la banane, se trouve posé le problème crucial de l’avenir agricole et agro-alimentaire de l’Outre-Mer.
La Commission,qui représente l’ensemble de l’Europe dans les négociations OMC, est-elle réellement motivée par les intérêts et l’avenir des RUP? On ne peut qu’être sceptique.
Dans ce contexte, les territoires concernés (DOM français, Communautés autonomes des Açores, de Madère et des Canaries) doivent agir de manière ferme et coordonnée afin d’imposer à Bruxelles une meilleure prise en compte de leurs spécificités. Des interventions limitées aux seuls parlements nationaux n’y suffiront pas.