L’eau, l’or noir du 21ème siècle, selon Oxfam-Solidarité

 

C’était un des objectifs du Millénaire pour le développement : satisfaire à un besoin essentiel, l’accès à l’eau dans les pays en développement.

Où en est-on ?

 

L’accès à l’eau s’améliore : d’ici 2015, on estime que 86 % de la population des pays en développement aura accès à de l’eau potable.

 

Mais ces beaux résultats perdureront-ils à long terme ? 

L’eau se fait en effet rare.

 

La quantité d’eau douce potable – moins de 1% de la quantité totale de l’eau existante sur terre – diminue de manière drastique à cause de la pollution et de la salinisation des sources.

 

D’après l’ONU, deux tiers de la population mondiale seront touchés par des pénuries d’eau d’ici 2025.


Pour les multinationales, qui dit pénurie dit opportunité.

 

Soutenues par la Banque Mondiale, le FMI et l’OMC, elles tentent partout dans le monde de prendre le contrôle des services d’eau et des installations de purification.

 

Ces sociétés privées ayant pour priorité de faire du bénéfice, ils facturent l’eau à des prix excessifs et ferment le robinet aux personnes qui ne peuvent payer la note.

 

De plus, ils manquent de transparence et ne fournissent pas toujours de l’eau de bonne qualité.

 

En Afrique du Sud par exemple, l’eau est devenue impayable et peu sûre depuis sa privatisation au profit du géant français Suez. Seuls les plus riches ont été en mesure de payer leur facture.

 

Des milliers de personnes ont été privées d’eau et ont dû se rabattre sur des sources polluées.

 

Cette situation a donné lieu en 2000-2001 à la plus grande épidémie de choléra depuis des décennies : au Kwazulu-Natal, une province au nord-est de l’Afrique du Sud, 300 personnes sont mortes et plus de 120.000 ont été infectées.


L’UE ET LA BANQUE MONDIALE COMPLICES


Malgré ce genre de conséquences, on continue à mettre les pays du Sud sous pression pour qu’ils privatisent l’approvisionnement en eau, et ce par le biais d’accords commerciaux – dans le cadre de l’AGCS notamment.

 

Les multinationales européennes, telles que Suez et Veolia, sont les premières à se remplir les poches grâce au nouvel or noir.

 

Il n’est donc pas étonnant que l’UE se montre particulièrement insistante.

En mai dernier encore, un porte-parole de la Commission européenne déclarait que l’eau est un bien commercialisable, une marchandise comme les autres.


La Banque Mondiale joue elle aussi un rôle important, avec ses moyens de pression habituels :l’obtention d’un prêt pour les pays en développement est ainsi conditionnée à la privatisation de l’eau.

 

« Au lieu d’être un instrument de développement pour les pays du Sud, la Banque Mondiale se met au service des pays riches du Nord », explique Riccardo Petrella, auteur du « Manifeste de l’Eau » et fondateur du Groupe de Lisbonne (groupe d’intellectuels qui proposent des analyses critiques de la mondialisation).

 

Et Ricardo Petrella d’enfoncer le clou :

 

« la Banque Mondiale donne de l’argent aux pays en développement pour que des entreprises du Nord puissent y exploiter leurs richesses naturelles, alors que les bénéfices de ces exploitations ne refluent pas vers ces pays en développement.

Depuis la fin des années 70, les pays possédant des richesses naturelles sont devenus de plus en plus pauvres, et inversement. »


A Cochabamba (Bolivie), cette politique a conduit à une véritable guerre de l’eau en 2000.

En échange de prêts, la Bolivie avait dû privatiser certains services publics.

 

Lorsque la firme Aguas del Tunari, propriété de la multinationale américaine Bechtel, a obtenu une concession de 40 ans pour l’approvisionnement en eau de la ville, les prix ont augmenté de 200 %.

 

En outre, Aguas del Tunari avait obtenu le contrôle des puits que des communautés locales avaient creusé pour leur approvisionnement.

 

Excédés, les habitants de Cochabamba ont paralysé la vie publique pendant 4 jours, déclarant ainsi une ‘guerre de l’eau’.

Ce qui décida les autorités à résilier le contrat et à reprendre en main l’approvisionnement en eau de la ville.


UNE POLITIQUE D’APARTHEID DE L’EAU ?


Les partisans de la privatisation argumentent que bien souvent, les pays du Sud n’ont ni les moyens, ni l’expertise pour approvisionner leur population en eau potable.

 

De plus, les entreprises privées travailleraient de manière plus efficace et devraient donc en principe proposer les meilleurs prix.

 

Des arguments rejetés par Riccardo Petrella :

 

« Le secteur privé, lui, ne fera d’investissement que s’il peut en tirer du profit.

Vers quel scénario nous dirigeons-nous dès lors ?

De l’eau de qualité pour les riches, juste assez d’eau pour les classes moyennes et pas d’eau du tout pour les pauvres ?

Nous ne pouvons pas laisser la responsabilité de la gestion de l’eau à la logique du marché.

Il faut au contraire réinventer et renforcer les moyens publics.

L’eau est tout simplement trop précieuse. »

 

L’ONU, elle, a bien compris le message.

Elle vient de reconnaître l’accès à l’eau potable et à des installations sanitaires comme un droit humain.


Cette décision historique contribuera-t-elle a changer les mentalités ?

Source : Hanne Stevens dans le magazine Globo

                                                                                                                                                                                                                                                                                              

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