Lu dans le journal L’Humanité – Fusion région – départements : ballon d’essai en Alsace

 Le 7 avril, un référendum se tiendra sur la fusion de ses deux départements et la région en une seule entité, territoriale, devançant l’idée néo-
libérale de disparition des départements.

 

Donné vainqueur par un sondage, dans lequel trois Alsaciens sur quatre se déclarent favorables à la création d’une collectivité territoriale unique en Alsace en lieu et place du conseil régional et des deux conseils généraux du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, le oui n’a pas encore la partie gagnée.

 

La campagne ne fait que commencer et l’incertitude quant à la participation est importante – il faut au moins un quart des électeurs inscrits dans chacun des deux départements concernés pour valider cette réforme institutionnelle.

 

Présentée par la droite (UMP et UDI) comme « historique », la disparition des deux départements ainsi que de la région Alsace, au profit d’une collectivité territoriale unique, est doublement argumentée.

 

Il s’agirait d’abord de faire des économies, de simplifier et de peser plus face à l’État.

La droite alsacienne, comme à l’accoutumée, surfe sur l’idée, largement entretenue, d’Alsaciens laissés-pour-compte.

 

Le président de l’actuel conseil régional, Philippe Richert (UMP), jure que « les gens sont enthousiasmés par ça dans d’autres régions », citant notamment la Bretagne et la Normandie.

 

L’ancien ministre des Collectivités territoriales sent que « Paris nous laisse plutôt faire. À nous d’y aller ».

Si le oui l’emporte le 7 avril, il se fait fort de faire adopter la loi qui en découle par le Parlement, pour une application qui devra attendre les prochaines élections territoriales de 2015.

 

Même née à droite, l’idée de fusion et d’économies budgétaires ne serait pas pour déplaire à l’Élysée qui, de même, encourage l’opération de redécoupage institutionnel que mène Gérard Collomb dans le Rhône.

 

Les socialistes régionaux sont pourtant divisés, et Roland Ries, le maire socialiste de Strasbourg, îlot de gauche dans la dernière région gérée par la droite, votera non, qualifiant la collectivité projetée de « véritable usine à gaz ».

Qui n’attend même pas la future loi de décentralisation.

 

Pour compliquer la donne, François Hollande, en visite dans la capitale alsacienne début février, a annoncé que l’agglomération strasbourgeoise serait dotée prochainement d’un statut d’« eurométropole », encore flou mais censé lui donner des pouvoirs étendus.

 

Un projet flou  

 

Secrétaire départementale du Parti communiste dans le Bas-Rhin, Béatrice Lejarre refuse « un projet dangereux » et cite un proverbe alsacien, « Ich kauf net e katz im e sack » (je n’achète pas de chat dans un sac), pour dénoncer le flou du projet, « toutes les questions relatives à la mise en œuvre concrète des transferts de compétences seraient envisagées ultérieurement, après le référendum ».

 

« Réduire le nombre d’élus, simplifier, faire des économies… Voilà les arguments de bon sens dont les promoteurs de la collectivité territoriale d’Alsace se drapent », or, dit-elle, « les Alsaciens le savent d’expérience : lorsqu’il y a fusion, leurs besoins sont moins bien satisfaits.

Les fusions des Assedic et de l’ANPE, les guichets uniques ont-ils permis un meilleur service public ?

Les usagers de la Sécu bénéficient-ils de meilleurs services depuis qu’on a fusionné des centres ? »

 

Allant plus loin, Béatrice Lejarre pointe que la future collectivité territoriale « pourrait obtenir des dérogations, pour passer des accords transfrontaliers ouvrant la porte à toutes les tentatives de détricotage du Code du travail ».

 

Déjà, « à l’aéroport de Bâle-Mulhouse, le droit suisse a été appliqué ».

Résultat ? « 300 emplois en moins en un an. »

 

Réaction de Bernadette Groison de la FSU : Un projet de loi à amender…


En transférant aux régions davantage de compétences, le risque est grand d’avoir des politiques régionales dans l’incapacité de relever les défis à venir.

 

L’État doit assumer pleinement ses responsabilités d’acteur économique, social, culturel et écologique.

Et l’intérêt général ne saurait se résumer à la somme des intérêts particuliers.

 

Le projet de loi pour une nouvelle étape de décentralisation aurait dû être l’occasion de mener ce débat sur le rôle de l’État et des services publics, après les dégradations subies ces dernières années.

 

Or, ce texte, qui arrive prochainement au Parlement, s’attache plus à répartir les compétences entre collectivités qu’à identifier les objectifs en termes d’amélioration des services rendus aux citoyens.

De même, aucune réelle péréquation financière n’est envisagée.

 

En l’état, la FSU ne peut être d’accord.

Espérons que le débat parlementaire donne à cette réforme davantage de souffle.

 

Et s’inspire des mots de Stéphane Hessel pour qui les services publics étaient « une question de dignité humaine et de cohésion sociale » !

 

Lionel Venturini


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