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2012
Institutions – Collectivités locales – Transferts de compétences : attention, chat échaudé craint l’eau froide ! (1er volet)
Catégorie : INSTITUTIONS - COLLECTIVITÉS LOCALES, OUTRE MERSLe Sénat a organisé les États généraux de la démocratie territoriale.
Il s’agissait d’une part, d’une grande concertation avec tous les élus, municipaux, conseillers généraux et régionaux, parlementaires, et d’autre part, de tables rondes sur différents thèmes.
L’une était consacrée à l’outre-mer.
Situation hexagonale et situation mono départementale
Il y a eu l’intervention du Président de la République, étrangement placée en début de matinée du deuxième jour de la conférence.
Il a lancé quelques pistes.
Il a notamment proposé d’aller « au bout de la logique des blocs de compétences » dévolues à chaque niveau territorial.
Autrement dit, à partir de ce qui existe, accentuer le transfert de compétences.
C’est par exemple le cas avec les régions qui vont avoir la responsabilité des politiques de l’emploi, de la formation et du soutien aux PME-PMI.
Le Président de la République a également évoqué la question des départements, qui devrait avoir l’essentiel des compétences relevant du champ du handicap et de la dépendance.
Sur le papier, cela fonctionne, mais surtout pour les régions et les départements de France métropolitaine.
Faut-il rappeler que, à La Réunion, Département et Région s’étendent sur un seul et même territoire ?
Dès lors, on peut s’interroger sur la pertinence de deux niveaux de décisions, quand bien même les compétences seraient bien identifiées de part et d’autre.
La question des ressources affectées à ces transferts
La première interrogation vient évidemment de la question des ressources affectées à ces transferts.
Lors de la décentralisation de 2004, un gros problème avait surgi.
La manière dont les transferts financiers ont été réalisés.
Il s’agissait de transferts statiques et non dynamiques.
Pour La Réunion, comme pour tout l’outre-mer, les bases de référence ont été celles des dotations ou subventions versées les années précédentes.
Or, l’outre-mer et La Réunion ne connaissent pas la même évolution que sur le plan hexagonal.
C’est déjà évident sur le plan démographique.
La Réunion connaît une population en constante augmentation.
Le coût du foncier
Cela a des conséquences à tous les niveaux de la vie économique et sociale.
La question des collèges et lycées en est un exemple démonstratif.
En France métropolitaine, on n’en construit plus ou presque.
À La Réunion, il nous faut encore construire un collège et un lycée tous les 18 mois.
Ces constructions relèvent du Département et de la Région.
Sur le plan strictement budgétaire, cela n’est pas neutre, bien évidemment.
D’autant plus qu’à cela s’ajoute la question du foncier.
On se souvient qu’un lycée a été déprogrammé puisque la nouvelle majorité de la commune qui devait l’accueillir a changé, et celle-ci n’entendait pas mettre gracieusement à disposition de la Région le terrain, comme cela s’était fait partout jusqu’alors.
Un transfert de ressources a minima concernant les TOS
Un désagrément qui en cache d’autres, plus important.
Car ces collèges et ces lycées, il faut bien les faire vivre.
C’est à dire y mettre du personnel non enseignant (celui-ci restant à la charge de l’État).
Ce personnel d’entretien relève du Département et de la Région.
Mais les dotations accordées aux collectivités locales ne tiennent pas compte des charges inhérentes à ces nouveaux lycées et collèges.
Donc les personnels doivent être payés sur les fonds propres des collectivités réunionnaises.
Et si l’on rajoute à cela le fait que, avant le transfert, la situation des TOS était disparate, bien des agents employés par l’État avaient fait la douloureuse expérience d’une suite de contrats à durée déterminée.
La règle de la compensation à l’euro près… encore au stade théorique
Sur le plan strictement humain, le problème est inacceptable.
Mais cela a eu aussi des conséquences sur le plan financier des collectivités, puisqu’elles ont du intégrer ces personnels ; l’impact budgétaire n’était pas neutre.
Cette question du transfert financier est donc indissociable de la question du transfert de compétences.
La loi de 2004 avait – en théorie – affirmé que la compensation allait être faite à l’euro près.
Force est de constater que cela n’a pas été le cas.
Cela est vrai pour la question de l’éducation, comme démontré ci-dessus.
Mais cela est encore plus vrai pour la question des prestations sociales.
La Réunion connaissait déjà une situation économique et sociale difficile, avec un grand nombre de foyers vivant sous le seuil de pauvreté.
Ce nombre de foyers a augmenté, du fait de la crise.
Des prestations sociales en constante augmentation
Laquelle crise, malgré ce que l’on peut entendre ici où là, est encore bien présente.
Et quoi qu’on puisse en dire, on ne sait pas quand elle va se terminer.
Ces prestations sociales sont donc, depuis 2004, en constante augmentation.
Ce qui n’a pas été le cas pour les transferts financiers.
Ils n’ont pas augmenté pour faire face à la montée en puissance de la demande.
Mais en plus, ils n’ont pas été à la hauteur dès la première année du transfert.
Conséquence : les Départements sont étranglés. C’est d’ailleurs l’un des messages que les présidents et présidentes de Département vont lancer au Président de la République, ce lundi, puisqu’ils sont reçus à l’Elysée.
Un rendez-vous qui n’est d’ailleurs pas sans rappeler celui qu’avait fixé François Hollande à destination des présidents de conseils régionaux… mais un rendez-vous qui n’avait pas été honoré par Didier Robert… faut-il s’en étonner ?
(À suivre)
bilan de la réception à l’Elysée: on va vous donner quelques euros, histoire de vous calmer, mais on va aussi vous demander de payer plus. notamment pour embaucher des jeunes en contrat dit aidé. bien sûr, on évoque des pistes de financement pérennes; mais tout de même: décentraliser quand le tempo et la musique sont joués à paris…