Le projet socialiste et les outremers ( 7/30 ) – vers des indicateurs macroéconomiques nouveaux ?

 

Dans le prolongement des articles consacrés au projet global, voici la présentation des propositions socialistes pour l’outre-mer.

Il appartient aux responsables politiques réunionnais d’envisager de marquer d’une empreinte réunionnaise ce projet présidentiel de 2012. Dès lors, il est ouvert à toute discussion.

 

La septième proposition socialiste est celle-ci :

 

« Asseoir l’action publique outremer sur des indicateurs macroéconomiques permettant de mesurer les écarts à combler type IDH et supprimer l’indice national du chômage hors DOM ».


Dans son projet « national », le PS déclare ceci :

«La variation du produit intérieur brut (PIB) que traduit l’indice de croissance reflète la dynamique de production d’un pays.

C’est indispensable, mais pas suffisant. Il y a bien d’autres données pour estimer la richesse d’un pays.

Sur la base du rapport de la Commission présidée par le prix Nobel d’économie Joseph E. Stiglitz – sollicité et finalement ignoré par l’actuel président de la République –, nous élaborerons un indicateur de développement humain (IDH).

Publié chaque année, il sera basé sur les critères économiques traditionnels, mais aussi de justice et de cohésion sociale (inégalités de revenus, accès au logement), d’émancipation individuelle (accès aux études supérieures, accidents et suicides au travail) et de préservation de l’environnement (taux de recyclage des déchets, qualité de l’air).

Toutes les formes de capital – naturel, éducatif, économique, technologique – nécessaires à la production de richesses pourront ainsi être prises en compte dans les politiques publiques. »


Première remarque : « supprimer l’indice national du chômage hors DOM ».

Autrement dit, intégrer les chiffres du chômage outre-mer dans les statistiques nationales.

 

En effet, pour l’instant, les chiffres donnés par l’INSEE ne comptent pas le chômage  extrêmement fort  dans les DOM.

Ce qui donne une vision très incomplète et même fausse, de la situation.

 

La mesure a une portée symbolique forte.


Ensuite, vient la vraie proposition du PS :

« Asseoir l’action publique outremer sur des indicateurs macroéconomiques permettant de mesurer les écarts à combler type IDH ».

 

La formulation est étrange.

Tout d’abord, il semble logique d’asseoir toute action publique sur des critères (d’attribution comme d’évaluation).

 

Quels devraient être ces critères ?

Généralement, les principaux indicateurs macroéconomiques sont : le taux de croissance du PIB ; le taux de chômage ; le taux d’inflation.


1°- Le Produit intérieur brut (PIB) : celui de La Réunion, a chuté de 2,7% en 2009.

 

L’INSEE explique :

« La croissance 2009 enregistre ainsi son plus mauvais résultat depuis 1993.

Elle est inférieure de près de 6 points à celle de 2008. Elle est proche de celle de la France qui s’établit à – 2,6 % ». 

Le  critère « PIB » doit être pris en compte, parce que justement, il est la preuve d’une certaine vitalité de l’économie et des entreprises réunionnaises.


2°- Le taux de chômage : bien évidemment, ce critère va donner un tout autre sens aux résultats, vu le nombre de privés d’emplois que La Réunion connaît.

Et il convient aussi de prendre en compte ce critère.


3°-  Le taux d’inflation : Sur un an, entre 2010 et 2011, l’inflation à La Réunion avait été de 2,5% et en France, de 2% (données IEDOM de mai 2011).

 

Toutefois, malgré l’écart important, l’IPC (l’indice des prix à la consommation) seul ne peut être pris en compte, le coût de la vie étant plus élevé outre-mer qu’en France. Et que cela aussi devrait être comptabilisé dans cet indice.

Le G20, (même si ce n’est pas une référence !)  a récemment fait figurer parmi les  indicateurs macroéconomiques visant à évaluer les politiques économiques : la dette (publique et privé), le niveau de déficit public, l’épargne (et le taux d’épargne) et les investissements, la balance commerciale et le solde des investissements courants.


4°- La balance commerciale de La Réunion : les chiffres sont sans appel. Selon l’INSEE, pour janvier 2011, les importations ont représenté 323 M€ et les exportations… 17 M€.


5°- Les critères IDH : Au plan national, le PS évoque les inégalités de revenus, et l’accès au logement, l’accès aux études supérieures, les accidents et suicides au travail, la préservation de l’environnement (taux de recyclage des déchets, qualité de l’air etc.).


6°- Sur la question des revenus : L’Insee a réalisé la nouvelle enquête “Revenus fiscaux et sociaux” (ERFS), qui utilise les données fiscales de la Direction générale des finances publiques (DGFiP) et les données de prestations versées par la CAF de La Réunion.

 

Cette enquête montre qu’en 2008 le niveau de vie médian réunionnais est de 39% inférieur à celui de la France métropolitaine. Les inégalités de revenus sont plus accentuées, malgré le poids des prestations sociales.

Plus généralement, 49% des Réunionnais ont un niveau de vie inférieur au seuil de pauvreté national. La part de la population métropolitaine ayant un niveau de vie inférieur à ce seuil est d’environ 13%.

Le rapport inter décile s’établit à 5,2 à La Réunion. Cela signifie que le niveau de vie plancher des 10% des personnes les plus aisées est 5,2 fois plus élevé que le niveau de vie plafond des 10% des personnes les plus modestes, contre seulement 3,3 fois en France métropolitaine. (Source : IEDOM).


7°- En ce qui concerne le logement, les chiffres ont été donnés dans le document portant sur la  «5e proposition ».


8°- Les diplômés : Selon l’INSEE, en 2007, à La Réunion, la population de plus de 16 ans non diplômée est de 33,1% contre 15,3% en France métropolitaine.

 

Et la part des jeunes diplômés de l’enseignement supérieur (en 2007) à La Réunion est de 22,8%, la moyenne en France métropolitaine est de 40,9%.

Ce qui classe notre île en 2e position, juste derrière la Guyane, la Guadeloupe étant 3e et la Martinique 8e.

Paris arrive en tête avec… 72%.


9°- En ce qui concerne l’environnement, le recyclage des déchets… La Réunion et l’outre-mer sont loin derrière les moyennes de la France métropolitaine.


Tout cela pour dire la prise en compte de ces critères IDH est indispensable, car cela va mettre en évidence la situation réelle de La Réunion, trop souvent masquée par le seul PIB.

En revanche, quelles vont être les solutions préconisées non plus pour « mesurer les écarts » mais vraiment pour les combler ?


Cela pourrait être certes, le contenu de ce projet socialiste. Mais les mesures, aussi louables soient-elles, devront être chiffrées et financées. Or, malheureusement, rien n’est clairement mentionné dans le document.

                                                                                                                                        

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4 Commentaires sur

Le projet socialiste et les outremers ( 7/30 ) – vers des indicateurs macroéconomiques nouveaux ?

  • Jean-JacquesNo Gravatar |

    l’indice de développement humain (IDH) devrait être pris en compte systématiquement, pas pour supprimer le PIB, mais pour le compléter.
    je suis d’accord avec la conclusion: l’idée intéressante – mais en aucun cas innovante – d’introduire la notion d’IDH est indispensable, mais une fois qu’on a fait le constat, on fait quoi?

  • Hervé BoismeryNo Gravatar |

    La nécessité d’enrichir et de diversifier les indicateurs de développement doit être pleinement reconnue.
    Concernant La Réunion, il convient de signaler les travaux de M.Goujon (« Région et Développement » n°27-2008).
    Dans l’ensemble, l’IDH est un indicateur synthétique de développement calculé chaque année par le PNUD pour les pays et territoires indépendants en intégrant trois indices (indices de santé, d’éducation et de richesse monétaire).
    Par référence à cet indicateur, les progrès de La Réunion en termes de développement humain (au sens du PNUD) sont notables, malgré la persistance d’un important retard par rapport à la France métropolitaine.
    Selon les calculs du PNUD,la France se situerait au 10ième rang mondial avec un résultat de 0.952 (0.985 en Suède). Pour La Réunion, le chiffre serait de 0.881 selon Goujon. En 2005,La Réunion arrivait au niveau d’IDH de la France en 1985. Le retard de La Réunion est plus flagrant dans le domaine de la richesse monétaire que dans les domaines de la santé et de l’éducation, conséquence des politiques de service public.
    Dans une perspective internationale, le niveau d’IDH atteint par La Réunion serait comparable à celui d’un groupe d’une dizaine de pays situés dans les valeurs IDH = (0.87-0.90) qui occupent la 29ième à la 37ième place du classement mondial. Dans ce groupe, figurent certains pays membres de l’Union Européenne (Portugal, Tchéquie, Malte, Hongrie, Pologne) ainsi qu’une île-Etat des Antilles (La Barbade). Les îles du Sud de l’Océan Indien se trouvent beaucoup plus loin dans le classement avec des valeurs IDH = (0.80 -0.84) pour Maurice et les Seychelles et de (0.53-0.56) pour Madagascar et les Comores.
    Cependant, l’IDH doit être complété par d’autres indicateurs, notamment l’IPH (« Indicateur de pauvreté humaine »). Ce dernier indicateur intègre plusieurs indices significatifs: illétrisme, chômage, taux de pauvreté monétaire, probabilité de décéder avant 60 ans…
    Selon l’INSEE, au terme d’une étude sur la Région Ile de France, cet indicateur serait mieux adapté à un exercice de régionalisation. Surtout, cet indicateur, adapté à la rélité des pays développés, s’avère plus sensible que l’IDH.
    La notion de pauvreté est en effet parfois indépendante de la notion de développement. Certains pays parviennent mieux que d’autres à répondre au défi de la pauvreté et cela indépendamment de leur niveau de croissance et de développement. Les pays du nord de l’Europe sont des modèles en matière de lutte contre la pauvreté. A l’opposé, les Etats-Unis fournissent un contre-exemple avec une importante pauvreté, malgré des niveaux de richesse monétaire et d’IDH parmi les plus élevés du monde.
    La France serait dans une position intermédiaire…pour le moment, mais avec une tendance fâcheuse à se rapprocher du modèle social américain très inégalitaire.
    Concernant La Réunion, des travaux complémentaires d’investigation doivent être réalisés (avec le calcul d’un IPH) afin de guider rationnellement les prises de décision.

  • ArsinoéNo Gravatar |

    les socialistes ont voté un projet, donc l’ont approuvé. y compris leurs leaders… et l’on voit déjà le projet être « amendé »

    exemple: Déficits : Hollande et Aubry sortent des clous du projet PS

    http://www.francesoir.fr/actualite/politique/deficits-hollande-et-aubry-sortent-des-clous-du-projet-ps-119373.html

  • stefonieNo Gravatar |

    Il ne faut pas séparer PIB et IDH.

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