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2012
Le député socialiste Dosière veut-il supprimer les départements ?
Catégorie : INSTITUTIONS - COLLECTIVITÉS LOCALES, POLITIQUE FRANÇAISE
Je vous parlais le 19 septembre de l’inquiétude des maires des communes françaises, petites ou moyennes.
Eh bien, elles ont raison de s’inquiéter.
Non, ne croyez pas que le budget ait été publié en aussi peu de temps.
Non, cette inquiétude, elle prend sa source dans la déclaration d’un certain Dosière. Député de l’Ain. Et socialiste convaincu.
Un député qui ne manque pas d’idées
Avec cette double casquette, il a toute latitude pour proposer des solutions.
Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il ne manque pas d’idées.
Certaines relèvent du gadget ou du symbole.
D’autres portent plus à conséquences puisque touchant à la réforme des collectivités locales.
Mais l’objectif est là : il faut réduire les dépenses publiques.
Y compris celles des collectivités locales ! ET préparer la réforme des collectivités !
Le député socialiste Dosière propose donc des « solutions » pour réduire le déficit… et couper les budgets des collectivités locales !
Pourtant, cela partait d’un bon sentiment.
Puisque l’État demande aux Français (et aux Réunionnais) de se serrer (encore plus) la ceinture, pourquoi ne le ferait-il pas lui-même ?
Un État exemplaire ? C’est bien.
Enfin, tant que cette cure d’austérité attaque là où il y a encore des réserves.
Rigueur ? Mais lorsque les collectivités sont squelettiques…
Mais lorsque les collectivités sont squelettiques, que peuvent-elles encore donner ou que peut-on encore leur prendre?
René Dosière vient donc de faire « 50 propositions pour un État exemplaire : l’État au régime » ; le tout contenu dans un livre dont la sortie publique est prévue le jeudi 20 septembre.
Ce spécialiste des collectivités locales et de la chasse au gaspi institutionnelle (il a déjà publié en 2012 un livre intitulé « L’argent de l’État ») ne manque pas d’humour.
Il propose – par exemple – de
« régler le cas du pavillon de la Lanterne » (petit domaine des Yvelines, passé de l’Elysée à Matignon et réciproquement) ou
« d’indiquer la superficie des logements occupés par les ministres ».
Ou de limiter les effectifs dans les ministères.
Et les frais de déplacement des ministres.
Mais la régulation du budget de l’Elysée/Matignon permettrait, selon lui, une économie de 39 millions d’euros !
Autorégulation et fantasme
On pourrait aussi lui demander de rajouter le type d’appartement.
On se souvient de certains ministres qui avaient des appartements qu’ils n’auraient jamais du avoir !
Des trucs qui, selon lui, auraient l’avantage de frapper les esprits.
Car en quoi publier sur internet le budget de l’Elysée et rendre publique l’utilisation de la réserve de chaque député va-t-il régler la question du déficit public ?
À noter tout de même qu’il propose de supprimer la réserve parlementaire du Sénat (mise à la disposition des sénateurs pour financer des investissements locaux) mais… pas celle de l’Assemblée nationale, là où il siège !
Tout comme de faire apparaître les effectifs et les rémunérations de chaque cabinet ministériel.
Cela relève de la transparence de la vie politique.
Et à ce titre là, bien sûr, il a raison !
Chacun appréciera cette phrase de Dosière :
« La transparence pousse à l’autorégulation et évite les fantasmes ».
Là, je confirme. Cela fait fantasmer bien des braves gens, la question des revenus des élu(e)s de tout bord !
C’est même le fond de commerce de certains « journalistes » !
Encore un cumul supprimé ?
Mais René Dosière ne fait pas que dans le badinage, puisqu’il annonce qu’il faut absolument passer par une réorganisation des collectivités territoriales.
Se disant opposé au cumul vertical des mandats (parlementaire et local) et au cumul des indemnités correspondantes, il veut supprimer les doublons que sont les communes et les communautés de communes.
Sur le premier point, il va falloir attendre le projet de loi que le gouvernement devrait déposer à la fin de l’année.
Même si dans les rangs socialistes (ici, à La Réunion comme en France), certains élus ne le souhaitent pas du tout !
Histoire de limiter un certain gaspillage !
Cela reste néanmoins à voir.
Lorsqu’une commune transfère certaines de ses compétences à un EPCI, cela devrait, disent les spécialistes, faire baisser les effectifs de la première et augmenter ceux des secondes.
Ce n’est pas toujours aussi mathématique.
L’idée d’élire les conseillers communautaires (ceux qui siègent dans les EPCI) au suffrage direct peut être analysée et discutée.
Il y a probablement quelque chose à faire.
Avec une élection des conseillers communautaires au suffrage universel, c’est un « nouveau mandat » qui apparaît, et qui ne pourrait donc plus être cumulé avec celui d’adjoint au maire ou maire !
100% des maires et premiers adjoints !
C’est vrai que cette idée ne concernera pas Jean-Claude Fruteau, pas plus que Patrick Lebreton, tous déjà sous la double casquette de député et de maire.
C’est aussi le cas de Huguette Bello ou de Thierry Robert !
Mais, cela peut être embêtant pour tous les autres maires réunionnais (ou leurs adjoints) qui siègent dans les EPCI avec une présidence (tournante ou non) !
Ils sont presque tous concernés (sauf les précédemment cités).
L‘élu de l’Aisne souligne par ailleurs :
« Les 36.000 communes et 2.600 intercommunalités fonctionnent de façon autonome sur le même territoire, ce qui a provoqué une explosion des embauches et des dépenses, qui dépassent 140 milliards d’euros par an ».
Évidemment, si l’argument des indemnités n’est pas mis en avant, c’est sous la bannière de la souveraineté communale qu’ils avancent leurs réserves.
D’où la réponse de René Dosière :
« Nous ne sommes pas là pour défendre une commune mais les besoins des citoyens.
C’est à eux qu’il faut demander ce qu’ils pensent car c’est eux qui reçoivent la feuille d’impôts ».
Une coquette somme à économiser : 15 milliards d’euros !
Au bout, il y a une coquette somme : 15 milliards d’euros !
C’est ce que peut permettre d’économiser le regroupement des communes et des intercommunalités !
L’Association des communautés de France (ADCF) a jugé pour sa part que « sans doute, il est possible de faire des économies ».
« Mais il n’est pas sérieux, comme l’affirme M. Dosière, de penser qu’il est possible d’économiser 15 milliards parce que derrière il y a des services publics comme des transports en commun ou du ramassage d’ordures ménagères. »
Autre idée du député René Dosière : réduire la taille des conseils municipaux. Pourquoi pas ?
Mais alors que les ratios population / élus soient les mêmes pour toutes les communes, ici comme ailleurs, au Nord comme au Sud, à l’Est comme à l’Ouest !
Autre proposition surprenante : le contrôle des « dépenses de communication » des collectivités.
Économie envisagée: un milliard d’euros environ !
Contrôler la comm’ de la Région Réunion version Didier Robert ? Allez, chiche !
L’idée de Dosière jette le trouble aussi chez les conseillers généraux.
Certains y voient y filigrane la suppression du Département.
Il y aurait donc des communes, des structures intercommunales dotées de compétences gérées aujourd’hui par les conseils généraux mais qui peuvent changer demain.
La fin du Département ?
N’oublions pas l’acte III de la décentralisation, prévu pour fin 2012 ou début 2013 !
N’oublions pas non plus la volonté de Hollande de supprimer la loi Sarkozy sur la « fusion » Département / Région.
Et gardons en tête que le même Hollande a fait comprendre à toutes les collectivités qu’il fallait qu’elles soient économes et non dépensières, qu’elles allaient encore devoir se serrer la ceinture.
Le gouvernement présentera le 28 septembre son projet de budget pour 2013 qui cherchera une trentaine de milliards d’euros pour réduire le déficit public de 4,5% à 3% du PIB.
Le Président François Hollande a annoncé que l’effort porterait pour 10 milliards d’euros sur les dépenses et que les prélèvements sur les entreprises seraient augmentés de 10 milliards, tout comme ceux sur les ménages.
On attend donc avec impatience ce fameux projet de loi sur les collectivités locales !
Et pour l’anecdote, le député de l’Aisne a envoyé son livre à Lionel Jospin, chargé de plancher sur la moralisation de la vie politique.
Car chacun l’a compris, Dosière veut aussi une « grande loi de moralisation de la vie politique », afin de réconcilier les citoyens avec les institutions de la République.
Ceci étant dit, il est vrai que la question doit être abordée, discutée ; sans idée préconçue (même si cet article est quelque peu … impertinent !).