Garde à vue : la France doit-elle appliquer le droit… français ?

 

   Un très intéressant article de Tefy Andriamanana, sous le titre suivant « Garde à vue : la France doit-elle appliquer le droit… français ? », sur le site http://www.marianne2.fr, est paru lundi 20 Décembre 2010. Lecture.

 

« Des juges lyonnais souhaitent appliquer dès maintenant le nouveau régime de garde à vue, au nom du droit européen.

Ce que refuse le procureur général.

 

Derrière cette querelle de prétoires se cache un vieil enjeu juridique voire politique.

 

Un juge français peut-il refuser de faire appliquer le droit français ?

La question peut paraître stupide mais c’est un (vieux) débat qui agite le Tribunal de Lyon en ce moment.

 

En cause : l’épineuse question des gardes à vue, les magistrats divergeant sur les textes à appliquer.


En juillet dernier, le Conseil Constitutionnel avait demandé au Gouvernement de modifier la loi actuelle d’ici le 01 juillet 2011, jugeant le régime actuel contraire aux droits fondamentaux.

 

Une réforme est actuellement en discussion à l’Assemblée.

 

Elle devrait notamment permettre la présence d’un avocat tout au long de l’interrogatoire et non durant seulement trente minutes au cours de la première heure.

 

En attendant, la loi actuelle est toujours en vigueur.

Mais à Lyon (et ailleurs), des juges, à l’appel du Syndicat de la magistrature (SM), ont décidé de demander à leurs enquêteurs (police et gendarmerie) d’appliquer le futur régime.

 

S’estimant dans leur droit, ils se basent sur la Convention des droits de l’Homme (ratifiée par la France en 1974 et qui relève du Conseil de l’Europe et non de l’Union européenne).

 

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Guerre des magistrats

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Cette Convention avait déjà justifié l’annulation de gardes à vue par plusieurs tribunaux.

Notamment celui de Paris en février.

 

Le Tribunal correctionnel avait alors retoqué cinq gardes à vues en précisant dans ses attendus que le rôle du juge était « de faire prévaloir la Convention européenne, d’application directe en droit national ».

 

L’article 55 de la Constitution prévoit en effet que les traités internationaux ont une « autorité supérieure » aux lois nationales.

 

En cas de conflit entre deux textes, on fait appliquer le traité.

Le parquet général de Lyon a une analyse différente.

 

Le procureur général estime que la loi française, en attendant la réforme, continue de s’appliquer.

C’est la théorie de la loi-écran.

 

En clair, un acte judiciaire, s’il résulte de l’application d’une loi nationale, peut être contraire à un traité international.

La loi fait alors « écran » au traité et possède une force supérieure.

 

Sauf que ce principe, pour les traités internationaux, a été abandonné par la jurisprudence de la Cour de Cassation (en 1975) et du Conseil d’État (en 1989).

 

Le procureur général Jean-Olivier Viout a néanmoins demandé le 21 octobre à son parquet de faire « systématiquement appel » de toutes les décisions annulant une garde à vue contraire aux principes de la Convention.

 

Il a également demandé le 6 décembre à la gendarmerie locale de ne pas insister sur les nouveaux critères « quelle que soit l’opinion personnelle du magistrat prescripteur ».

 

La police lyonnaise a aussi ordonné à ses troupes de rester dans le régime actuel.  

 

Le parquet général n’était pas disponible pour répondre aux questions de Marianne2.

Les missives du procureur général n’ont pas plu aux juges rebelles.

 

« Il vous est loisible d’accepter que votre nom soit accolé à des procédures qui conduiront immanquablement à des condamnations de la France par la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH, chargée de faire respecter la Convention, ndlr) » a répondu le Syndicat de la Magistrature au procureur général.

 

Une telle condamnation est déjà tombée en octobre dernier.

 

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Question de souveraineté

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Au ministère de la Justice, joint par Marianne2, on estime que « c’est la loi actuelle qui s’applique », se rangeant derrière la position du parquet général.

 

On invoque le « principe de sécurité juridique » arguant que « quelqu’un à Lyon ou Lille doit bénéficier des mêmes droits ».

 

La Chancellerie rappelle également que les Sages ont fixé un délai pour modifier le système : « Laissons à cette réforme le temps d’entrer en vigueur ».

 

Mais ce débat n’est pas qu’une guerre des prétoires.

 

C’est la souveraineté juridique de la France qui est en jeu.

Ici, on peut voir qu’un traité international peut s’appliquer en lieu et place d’une loi française.

 

On peut rétorquer que les traités internationaux sont aussi ratifiés par le Parlement ou que les droits de l’Homme revêtent un caractère universel.

L’actualité récente a donné un autre exemple d’application directe du droit européen dans nos tribunaux.

 

Ce dernier touchait un point important : le rôle des procureurs.

 

Mercredi 15 décembre, la Cour de Cassation, au vu de la jurisprudence de la CEDH, avait rappelé que le parquet, dépendant du ministère de la Justice, « ne présente pas les garanties d’indépendance et d’impartialité requises » et n’est qu’une « partie poursuivante ».

 

Ce qui remet en cause sa capacité à contrôler les gardes à vues. 

L’évolution du droit français n’est décidément plus une affaire franco-française. » 

 

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1 Commentaire sur

Garde à vue : la France doit-elle appliquer le droit… français ?

  • PalhumourNo Gravatar |

    version Sarko, c’est pas « garde à vue » mais « garde à vous »

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